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Londres, dont sont tirées les briques pour la construction de l’immense capitale, et qui ne s’ouvre qu’avec difficulté sous la main du laboureur. Les comtés d’Essex, de Surrey et de Kent appartiennent, avec celui de Middlesex, à cette couche argileuse désignée en Angleterre sous le nom de stiff land, terre forte, et dont les agriculteurs de tous les pays connaissent bien les inconvéniens, que vient aggraver encore la fraîcheur du climat. Livrée à elle-même, cette argile ne sèche jamais en Angleterre, et quand elle n’est pas transformée par des amendemens et assainie par le drainage, elle fait le désespoir des fermiers. On ne la trouve pas seulement dans les comtés désignés, elle domine dans tout le sud-est et reparaît sur beaucoup de points du centre, de l’ouest et du nord.

Une longue bande de terres crayeuses de médiocre qualité traverse du sud au nord ce grand banc d’argile, et forme la plus grande partie des comtés de Hertford, Wilts et Hants; la craie presque pure s’y montre à la surface.

Les terres argilo-sableuses à sous-sol calcaire, les terres limoneuses ou loams du fond des vallées, n’occupent que à millions d’hectares environ. Les rivières étant plus courtes dans cette île étroite et les vallons plus resserrés qu’ailleurs, les alluvions y tiennent peu de place. Ce sont les sols légers qui dominent, ceux qu’on appelait autrefois poor lands, terres pauvres. Ces terres formaient, il n’y a pas bien longtemps, de vastes landes qui venaient jusqu’aux portes de Londres du côté de l’ouest, et presque partout elles sont devenues par la culture presque aussi productives que les loams. Il a fallu un mode d’exploitation parfaitement approprié à leur nature pour en tirer un si bon parti.

Il en est de même du climat. Les agriculteurs britanniques ont su admirablement utiliser les caractères distinctifs de ce climat particulier, mais en soi il n’a rien de séduisant. Ses brumes et ses pluies sont proverbiales; son extrême humidité est peu favorable au froment, qui est le but principal de toute culture; peu de plantes mûrissent naturellement sous ce ciel sans chaleur, il n’est propice qu’aux herbes et aux racines. Des étés pluvieux, des automnes prolongés, des hivers doux, entretiennent, sous l’influence d’une température à peu près constante, une végétation toujours verte. Là s’arrête son action; ne lui demandez rien de ce qui exige l’intervention du grand créateur, le soleil.

Combien le sol et le climat de la France sont supérieurs! En comparant à l’Angleterre, non plus seulement le quart, mais la moitié nord-ouest de notre territoire, c’est-à-dire les trente-six départemens qui se groupent autour de Paris, à l’exclusion de la Bretagne, nous trouvons plus de 22 millions d’hectares qui dépassent en qualité