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poursuit une session dont les alimens n’ont pas été nombreux jusqu’ici, le gouvernement continue à agir, à administrer, à appliquer ses idées dans les divers services publics ; il nomme des sénateurs, il institue par un décret une exposition universelle de l’industrie pour 1855 ; il s’occupe surtout du budget, qui vient d’être élaboré et discuté par le conseil d’état sous les yeux même de l’empereur, avant d’être soumis au corps législatif. Il ne faut pas s’étonner que l’intérêt, se détachant des luttes politiques, se reporte vers les affaires matérielles et financières. En définitive, c’est le dernier ordre de questions auxquelles un pays cesse de s’intéresser ; c’est celui où il éprouve toujours le besoin de voir clair. Un budget n’est-il point, à vrai dire, le livre de la fortune publique ? Chacun de ces chiffres qu’il contient ne va-t-il pas toucher aux plus intimes ressorts de l’existence nationale ? Le prochain budget d’ailleurs, à ce qu’il paraît, doit atteindre un but depuis longtemps poursuivi sans succès : il doit réaliser pour 1854 l’équilibre entre les recettes et les dépenses. Ainsi du moins l’annonce une communication officielle. Certes on ne saurait demander mieux, à la condition qu’aucun intérêt considérable n’en souffre, et que rien ne vienne déranger cet équilibre souhaité. Dans tous les cas, on peut toujours y voir l’influence du retour vers l’ordre et vers la sécurité. La communication dont nous parlions disait qu’il était dans l’intention de l’empereur que le budget fût désormais une vérité. À la bonne heure, que cet équilibre existe en effet, qu’il soit une vérité mieux que cette charte dont les révolutions seules ont fait un mensonge, et le résultat sera d’autant plus remarquable, qu’il coïncidera avec le maintien des réductions opérées dans plusieurs impôts depuis quelques années : réduction de l’impôt du sel et de la taxe des lettres, réduction de 27 millions sur la propriété foncière, abandon du dixième appartenant à l’état dans le produit des octrois. Dans leur ensemble, ces réductions ne s’élevaient à rien moins qu’à 96 millions. L’état a retrouvé un peu plus de 50 millions par le remaniement de l’impôt des boissons et de certains impôts indirects, par l’augmentation de certains droits d’enregistrement. Il reste donc pour le pays un dégrèvement réel de près de 45 millions. Le gouvernement a le soin de multiplier les exposés où se retrouvent les élémens de notre situation financière, et il n’a pas tort assurément. Les discussions prochaines du corps législatif ne feront sans nul doute qu’éclairer de lumières nouvelles ce progrès dans les finances publiques.

Si le gouvernement voulait répondre à un désir, à un besoin du pays, il n’en pouvait rencontrer un plus réel et plus vif que celui de voir s’accomplir des améliorations de ce genre. Ce n’est pas qu’il n’y en ait bien d’autres également légitimes qui doivent être le souci d’une administration juste et vigilante ; mais comment arrivera-t-elle à les découvrir pour les satisfaire ? Là est la question. Peu après le 2 décembre, on s’en souvient, le chef de l’état, en créant le ministère de la police, avait attaché au nouveau ministère des inspecteurs-généraux dont les attributions étaient peut-être un peu difficiles à définir. Ces nouveaux fonctionnaires, outre une mission de sécurité publique, étaient chargés d’une sorte d’enquête permanente sur les besoins, les intérêts, les tendances des populations ; mais il était aisé de voir qu’ils pouvaient n’être qu’une superfétation ou un embarras, leur action risquait de se