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siècle dernier la philosophie incrédule a confondu dans ses calomnies l’église catholique et la société du moyen-âge, parce que le moyen-âge a été l’arsenal où Voltaire allait puiser ses armes pour la croisade qu’il dirigeait contre l’église catholique, des écrivains généreux se sont crus obligés de relever le défi qui leur était porté. Ils ont fait comme des champions qui aiment mieux défendre une assertion fausse que de paraître recevoir un démenti. A un dédain inintelligent ils opposent une admiration qui n’admet pas beaucoup plus de nuances. Parce que le XVIIIe siècle a tout confondu pour tout blâmer, ils se croient obligés de tout confondre aussi pour tout exalter. C’est ainsi que de défi en défi et de provocation on provocation l’honneur de l’église s’est enfin trouvé engagé à soutenir que la société du moyen-âge était la plus paisible et la plus éclairée qui ait jamais paru sous le soleil! Il y a des tenans qui font la veille des armes pour faire souscrire à tout passant cette proposition.

Pour notre part, nous avouerons sans détour que, toutes les fois que nous voyons engager dans la presse contemporaine un débat sur l’excellence ou la corruption, sur les vertus ou les travers de la société du moyen-âge, sur l’horreur ou l’admiration qu’elle mérite, notre premier sentiment est celui d’un profond ennui. De telles discussions nous paraissent à la fois également stériles et interminables. Nous n’espérons guère en voir sortir quelque résultat utile, mais nous craignons fort qu’elles ne se prolongent indéfiniment. D’une part, le moyen-âge est si bien fini, qu’eût-il été la plus belle époque de l’histoire, il a peu de chances de renaître. Depuis quatre cents ans qu’il est au tombeau, il donne si peu de signes de résurrection ! Les oraisons funèbres à la longue sont monotones. D’autre part, une grande époque historique qui a duré cinq ou six cents ans ressemble exactement aux langues d’Ésope : rien n’égale le bien qu’on en peut dire, excepté le mal ; rien n’égale le mal, excepté le bien. On peut aligner par conséquent, pendant bien long-temps, des argumens opposés, de force et de quantités à peu près égales. Ce que nous sommes donc tenté de faire quand nous assistons à de pareils débats, c’est de donner raison aux deux adversaires en leur imposant également silence. Nous prendrions d’autant plus volontiers ce parti sommaire, que, les deux parts du bien et du mal une fois faites dans le moyen-âge, nous ne serions pas embarrassé de les distribuer. Nous ferions hommage de tout le bien à l’influence de l’église catholique; nous laisserions tout le mal en partage à la conquête, à la violence, aux malheurs et aux crimes de l’humanité.

Mais l’ennui est le moindre des inconvéniens de ces discussions : ce qu’elles ont de fâcheux, c’est qu’elles font perdre en tournois et en passes d’armes le temps et les forces nécessaires pour soutenir la lutte sérieuse de la foi contre l’incrédulité. Que les temps du moyen-âge, et principalement le rôle de l’église catholique dans ces temps, soient