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sincère hommage ; qu’il nous soit permis, avec la même sincérité, de hasarder quelques critiques. L’enseignement donné dans les établissemens ecclésiastiques n’est, autant que nous en pouvons juger, ni assez élevé ni assez mêlé au monde. Les séminaires sont les seuls canaux par lesquels il est transmis ; les études y sont peu profondes, peu générales : elles ne s’étendent pas au-delà des limites de l’instruction secondaire. D’un autre côté, les élèves y demeurent étrangers à toute espèce de rapports et de contact avec la jeunesse qui ne se destine pas à l’église, et y contractent des idées et des notions exclusivement cléricales. Sans doute il est convenable que la préparation aux augustes et sévères devoirs du sacerdoce se poursuive dans le recueillement et loin des entraînemens et des dissipations du siècle ; mais la barrière, en quelque sorte infranchissable, qu’on place entre le monde et l’église les condamne à s’ignorer mutuellement, à nourrir des préventions et des défiances réciproques, et semble plus propre à amener leur divorce qu’à sceller leur alliance. Le système actuel d’éducation des jeunes prêtres est une des causes les plus actives des préjugés qui règnent dans l’église contre le monde et dans le monde contre l’église. Si on les rendait moins étrangers l’un à l’autre, on les rendrait en même temps plus justes et plus confians entre eux.

Des facultés de théologie ont été fondées dans la double pensée d’élever le niveau de renseignement ecclésiastique et d’entr’ouvrir les portes du monde aux jeunes prêtres avant leur admission au ministère ; mais l’empereur, qui créa ces facultés, crut pouvoir se dispenser de se concerter avec le saint-siège : il en fit ce qu’il faisait de tous les lieux d’instruction, des établissemens universitaires ; il ne donna au clergé dans leur direction qu’une part étroite et indirecte. Le clergé conçut des inquiétudes, et n’envoya point aux facultés les élèves des séminaires. Très peu de candidats se présentèrent pour recevoir les grades qu’elles dispensaient ; malgré les décrets et les ordonnances qui subordonnaient à la collation de ces grades certaines fonctions ecclésiastiques, le gouvernement ne put procurer d’auditoire à ses professeurs, et le but fut manqué. Nous ne voulons pas examiner si en effet il n’appartenait pas au pouvoir politique de fonder et d’organiser les facultés de théologie. L’utilité qu’elles présentent nous touche plus que la prérogative de l’autorité civile en cette matière, et nous regretterions le triomphe de cette prérogative, s’il avait pour conséquence de priver le clergé des avantages qu’il peut trouver dans les facultés de théologie. Si l’église demandait à organiser seule ces facultés, nous reculerions devant cette prétention ; mais elle demande seulement à se concerter avec l’état, et, comme il dépendra toujours de celui-ci de faire ses conditions, aucun droit essentiel ne nous paraît en péril.

Au moyen des facultés organisées par le gouvernement d’accord avec le saint-siège, les emplois ecclésiastiques ne seraient plus conférés,