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Rome ? Nous ne nous dissimulons pas les difficultés qui naîtraient peut-être de ce retour à d’anciennes coutumes tombées en désuétude, et les embarras que pourraient susciter au gouvernement des assemblées qui céderaient peut-être à l’exemple de nos corps politiques ; mais nous avons la confiance qu’elles s’inspireraient surtout de l’esprit de l’Évangile, et que, sans atteinte aux droits du pouvoir politique, l’église gallicane y trouverait un point d’appui qui lui manque.

Pour terminer l’exposé des garanties inscrites dans les articles organiques, il nous reste à parler des appels comme d’abus.

L’origine des appels comme d’abus remonte en grande partie à des circonstances qui ne sont plus. Les appels comme d’abus ont eu pour objet principal de réprimer les envahissemens des juridictions ecclésiastiques ; ils servaient même à protéger l’église gallicane contre les entreprises de la cour de Rome : c’est ainsi que l’assemblée de Bourges en 1438, après avoir rédigé la pragmatique, la plaça sous la protection du roi pour la mettre à l’abri du pouvoir pontifical. Ce n’est plus sur ces bases que peuvent reposer les appels comme d’abus, mais d’autres raisons les rendent nécessaires ; elles se tirent des droits et des prérogatives conférés par le concordat même et par les articles organiques à l’église catholique et à ses ministres. Pour le prouver, il suffit de présenter le tableau de ces droits, de ces prérogatives. On peut considérer le clergé dans ses rapports avec l’état, dans les rapports des supérieurs avec les inférieurs, enfin dans ses rapports avec les citoyens pris individuellement.

Dans ses rapports avec l’état, le clergé catholique est investi d’un privilège considérable, et qui n’est accordé à aucun autre corps, celui de s’adresser directement au public dans la personne des fidèles, avec un caractère officiel et reconnu par le pouvoir politique. Tous les prêtres ont le droit de prédication et ne peuvent en être dépouillés que par l’autorité de l’évêque. Les évêques sont autorisés à faire des mandemens, des lettres pastorales, des instructions, qui sont publiés et affichés comme les actes de l’autorité publique. Ils doivent, il est vrai, se renfermer dans le cercle des fonctions spirituelles, mais ils peuvent en sortir. Il est d’ailleurs des sujets qui, bien qu’unis étroitement aux choses de la religion, comportent des excursions dans le domaine de la temporalité. À la vérité, les lois punissent certaines infractions qui pourraient être commises à l’aide soit de ces publications, soit de la prédication ; mais les lois n’ont pas prévu tous les cas, elles sont d’ailleurs empreintes d’une rigueur qui en rend l’application souvent impossible : elles obligent à déployer tout l’appareil judiciaire. Le gouvernement pourrait aussi suspendre le traitement de l’ecclésiastique, encore ce droit est-il contestable ; mais celle peine est mesquine, inégale dans ses effets, le plus souvent impuissante et plus propre à irriter