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Les articles organiques ont été en butte aux attaques les plus vives et les plus passionnées ; on en conteste la valeur légale à leur origine même, on les dit abrogés par les constitutions postérieures ; mais il est facile de répondre à ces objections.

Sans rechercher si, comme on le prétend, le saint-siège a protesté contre les articles organiques, sans consulter à cet égard l’histoire, où se trouvent les documens les plus contradictoires, nous nous bornons à une réflexion qui rend cette recherche inutile. Les articles organiques sont une loi de l’état, volée, sanctionnée, promulguée par les pouvoirs publics. Or, parmi les lois de l’état, il n’est donné à personne d’établir des distinctions pour obéir aux unes, pour fouler aux pieds les autres ; toutes ont droit aux mêmes respects. Une religion qui prescrit l’obéissance aux pouvoirs établis est tenue la première de donner l’exemple de cette soumission. La doctrine contraire est éversive de l’ordre social. Sans doute le spirituel et le temporel doivent demeurer séparés ; nul ne le conteste aujourd’hui : c’est le principe du droit moderne, le gage de la liberté de l’église et de l’indépendance de l’état, le terme des luttes entre le sacerdoce et l’empire ; mais il est une foule d’objets mixtes où les deux pouvoirs se trouvent mêlés, et il appartient au pouvoir politique de juger quelles questions appartiennent à son domaine et de les résoudre. Cependant, nous le reconnaissons, appeler l’état et l’église à en délibérer en commun, à se concerter, à s’entendre, est le moyen le plus propre à conserver la bonne harmonie ; c’est celui que doit rechercher d’abord un gouvernement prudent ; c’est la voie que le comité des cultes de l’assemblée constituante en 1848 a proposé de suivre, lorsqu’il a été d’avis d’entamer des négociations avec le saint-siège sur des questions que le pouvoir politique aurait à la rigueur le droit de trancher : conseil prudent et qui mérite qu’on le suive. Aucun pouvoir sage n’use de son droit à l’extrême. L’église, aussi bien que l’état, ferait un mauvais emploi du sien, si elle l’exerçait à outrance. Cette réserve est dans l’esprit de nos institutions modernes, qui consacrent des droits souvent contradictoires dans leur application absolue, et rendent ainsi la modération nécessaire et les transactions inévitables. Ce qui est vrai pour les rapports des pouvoirs politiques entre eux ne l’est pas moins pour les rapports du pouvoir civil et du pouvoir religieux. Les concordats sont l’instrument de cette conciliation. Que le gouvernement donc négocie avec Rome ; s’il ne fait aucune concession dangereuse, nul ne s’en plaindra et les amis de la religion y applaudiront ; mais, en attendant, personne n’a le droit de se mettre en rébellion contre des lois en vigueur depuis cinquante ans et revêtues de toutes les formes qui les rendent obligatoires.

Ceux qui les attaquent commettent d’ailleurs une singulière inconséquence ; ils se gardent bien de contester l’autorité des dispositions