Page:Revue des Deux Mondes - 1852 - tome 15.djvu/838

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Avec la restauration, ce régime ne fut modifié que dans le sens d’un retour à la prépondérance de l’église catholique. La charte l’érigea en religion de l’état. Des lois firent entrer le pouvoir politique dans le cercle des croyances religieuses. La liberté assurée aux cultes ne fut donnée qu’à ceux que la loi avait reconnus. Seuls ils obtinrent de la loi du 25 mars 1822, ainsi que leurs ministres, une protection contre l’outrage et la dérision. Les salaires payés par le trésor public furent constitutionnellement refusés à tous autres cultes que les cultes chrétiens. L’égalité même était ainsi rompue.

Elle fut rétablie par la charte de 1830, où la religion catholique cessa de porter le titre de religion de l’état, et où disparut la disposition qui réservait aux ministres des seuls cultes chrétiens un traitement sur les fonds de l’état. Une loi rétribua le culte israélite. La loi du sacrilège fût abolie. Il n’y eut plus de religion dominante. Les cultes salariés obtinrent un appui efficace ; ils acquirent même de la confiance de l’état, secondée par les progrès de la raison publique, plus d’indépendance que ne leur en accordaient les lois en vigueur. Une liberté étendue était laissée aux cultes reconnus ; mais ils étaient exclusifs, et la liberté même des cultes n’existait pas. En effet, le régime préventif était maintenu, et la jurisprudence de la cour de cassation, nous le disons à regret, tendit à resserrer de plus en plus les liens qui arrêtaient cette liberté dans son essor. La cour de cassation déclara les art. 291 et 292 du code pénal applicables aux simples cérémonies religieuses, même aux réunions formées à l’appel d’un ministre régulier, appartenant à un culte reconnu par l’état. Lors de la discussion de la loi du 10 avril 1834, le ministre de la justice avait dit : « S’il s’agit de réunions pour le culte à rendre à la Divinité, la loi n’est pas applicable. Nous le déclarons de la manière la plus formelle. » Le rapporteur de la chambre des pairs n’avait pas été moins explicite : « Si cette déclaration (celle du garde-des-sceaux), avait-il dit, n’est pas dans la loi elle-même, elle en forme du moins le commentaire officiel et inséparable. C’est sous sa foi que l’article a été voté par l’autre chambre, et qu’il pourra l’être par vous, et il n’est pas à craindre qu’un tribunal en France refuse de l’entendre ainsi. » Nonobstant ces explications, la loi de 1834 fut appliquée aux cultes.

Toute équivoque disparut avec la constitution de 1848, qui reconnut la liberté des cultes dans les termes les plus formels, et effaça les termes qui, dans les chartes de 1814 et de 1830, avaient soulevé quelques doutes. Une lettre officielle du ministre des cultes, M. de Falloux, en date du 27 février 1849, déclara expressément « qu’en assurant à tous les cultes une égale liberté et une égale protection, la nouvelle constitution n’avait fait, entre ceux qui étaient reconnus par la loi et ceux qui ne l’étaient point, d’autre distinction que celle relative au salaire