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population finira par apprécier les avantages qui lui sont si libéralement offerts.

La caisse des retraites, annexée, à l’origine, à la société de secours, dont elle était le corollaire, avait devancé l’ouverture de la caisse générale créée plus tard sous la garantie de l’état. En présence de ce dernier établissement, l’institution propre à la fabrique de Lyon perdait toute raison d’exister séparément; mais la société de secours mutuels en conserve la trace en remplissant le rôle d’intermédiaire entre ses membres et la caisse nationale. Ces deux institutions, société de secours et caisse de retraites, visent l’une et l’autre à former un faisceau qui a pour lien l’épargne et la prévoyance. Tout en facilitant la voie sous les pas de l’ouvrier, elles évitent de se charger seules de sa destinée; elles lui demandent un sacrifice qui relève le caractère de l’assistance obtenue, mais un sacrifice qui, sans leur appui, demeurerait absolument stérile.

Tandis que le concours prêté découle ici du sein même de la fabrique, les pensions allouées à des ouvriers trop âgés pour pouvoir être admis au bénéfice de la caisse des retraites sont prélevées sur les fonds communaux. Le conseil municipal de Lyon a inscrit dans son budget une somme annuelle de 12,000 francs destinée à cette dépense. Le taux de ces pensions varie, suivant l’âge et les infirmités, de 100 à 200 francs. La fusion accomplie entre Lyon et les communes voisines permettra, il faut l’espérer, malgré les distinctions maintenues dans le régime financier, d’étendre le bénéfice de ces rentes viagères aux travailleurs de toute l’agglomération lyonnaise que réunit déjà sous son égide la société de secours mutuels et qu’embrasse une même destinée sociale.

Les fruits de ces diverses institutions, on les recueillera de plus en en plus à mesure que les défiances se dissiperont au grand jour des faits accomplis. L’effort persévérant vers le bien et la vigilance attentive à prévenir ou à réprimer le mal sont à Lyon, plus encore qu’ailleurs, deux conditions essentielles pour mettre l’avenir à couvert des périls du passé. Les ouvriers ont ici besoin d’être défendus contre des souvenirs funestes et contre les penchans mêmes de leur esprit ; mais il importe de continuer aussi à les aider dans une carrière exposée à tant de hasards. Quelles mesures nouvelles pourraient être prises en dehors des institutions existantes? Quelle ligne de conduite faut-il suivre au milieu de ce labyrinthe industriel dont nous avons essayé d’éclairer les obscurs circuits?

Les vices qui travaillent la population laborieuse de Lyon appartiennent à la fois à l’ordre moral et à l’ordre économique. Les causes de trouble moral dérivent, en dernière analyse, de deux sources principales qui ont entre elles d’intimes rapports : l’altération profonde