Page:Revue des Deux Mondes - 1852 - tome 15.djvu/1134

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

que présente la localité : c’est là que le maître de la maison, les visiteurs ou les domestiques font leurs ablutions, qu’ils répètent plusieurs fois dans la journée. L’habitation est distribuée de la manière suivante : un premier corps de bâtiment, ouvert sur la cour, contient ce qu’on appelle le divân-i-khdnèh, c’est-à-dire le salon de réception, le lieu où le maître du logis se tient pour recevoir ses visites et traiter ses affaires. D’autres pièces plus petites, placées de chaque côte ou en arrière, servent de logement aux hôtes qu’il peut avoir à héberger ; c’est là aussi que se tiennent les serviteurs et qu’ils préparent les kalioûns, le thé ou le café pour les visiteurs. Derrière ce premier bâtiment, et complètement caché, est l’appartement des femmes et des enfans. Il y a, comme on voit, dans une habitation persane, deux portions tout-à-fait distinctes : l’une, qui est en quelque sorte publique ; l’autre, où aucun étranger ne pénètre. Tout cela occupe ordinairement le rez-de-chaussée ; rarement quelques pièces se trouvent à un étage supérieur. Cette distribution, toute en surface horizontale, exige beaucoup de terrain. Les coutumes ne permettant pas à deux ménages d’habiter sous le même toit, il en résulte la nécessité d’une grande superficie pour chaque maison, et, par suite, pour les villes une étendue qui ne se trouve pas, comme chez nous, en rapport avec la force numérique de la population.

Quand le maître de la maison a fait sa toilette du matin et dit sa prière, il passe de son harem dans le divân-i-khânih. Là, sur un tapis qui couvre entièrement le sol, placé à l’un des angles, il attend ses visiteurs. Dans la belle saison, il s’asseoit près de la fenêtre ouverte sur la cour plantée où l’on a soin d’entretenir quelques fleurs. Si c’est l’hiver, il se met dans le coin opposé, et l’on place au milieu de la salle un réchaud ou mangal qui contient de la braise recouverte de cendre, sur laquelle on pose des fruits odorans qui, en s’échauffant, parfument l’appartement. Si le maître est un personnage quelque peu considérable, les visiteurs sont en grand nombre ; les uns viennent lui faire la cour comme à leur supérieur pour en obtenir une faveur ; les autres n’obéissent qu’au goût prononcé et répandu en Perse pour les visites et la causerie. Le maître de la maison est assis par terre, les jambes croisées sous lui ; tous les visiteurs, accroupis de la même manière, sont rangés autour de la pièce, contre les murs, dans l’ordre scrupuleusement suivi qui donne à chacun la place qui lui revient par sa position sociale. Les Persans poussent très loin l’observation de cette règle hiérarchique, Quand quelqu’un entre dans l’appartement, si c’est un personnage de distinction, le maître du logis se lève, reste debout jusqu’à ce qu’il soit assis, et, dans ce cas, au lieu de croiser les jambes, il s’assied sur ses talons. Si c’est un égal, il se lève, mais se rassied tout de suite en croisant les jambes. Si c’est son inférieur, il fait simplement le geste de se lever. Les Persans ont un tact incroyable pour voir du premier coup d’œil,