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avec une rapidité extrême en le saisissant des serres et du bec. Aussitôt qu’il en était maître, on courait sur lui, et, au moyen de quelques petits morceaux de viande qu’on lui présentait afin de lui faire lâcher sa prise, on la lui enlevait facilement. On revint avec quelques lièvres et perdrix.

Il y a une autre chasse qui offre plus d’intérêt que celle-ci en raison des difficultés qu’elle présente, c’est celle du héron blanc. Dès que cet oiseau aperçoit les chasseurs, il s’élève dans les airs, et l’on est obligé de lancer de très loin le faucon, qui fait de grands efforts d’ailes pour l’atteindre. Le héron monte en traçant une large spirale, et, par le nombre infini de cercles qu’il décrit, il donne à son ennemi le temps de l’atteindre, Souvent la rencontre n’a lieu que très haut, et c’est à peine si l’on distingue un point blanc, brillant au soleil dans l’azur du ciel, tandis que le faucon monte toujours résolûment, mais à une grande distance encore de sa proie. Cependant il la saisit, et l’on attend avec anxiété le résultat de son attaque. Si l’on ne peut apercevoir ce qui se passe dans les régions élevées où sont parvenus les deux oiseaux, on devine facilement un duel à outrance. Le héron se défend, son long bec fait de cruelles blessures à celui qui est venu l’attaquer si haut, et le combat pourrait devenir fatal à l’agresseur, si l’on ne lui envoyait du renfort. Alors on prépare un second faucon qui regarde un instant dans l’air, fixe un point imperceptible pour d’autres yeux que les siens et part comme une flèche. Il monte, tourne rapidement, monte toujours, puis disparaît… Après quelques minutes d’attente, on voit tout à coup se détacher du ciel et glisser lentement dans l’air une masse blanche ; sa chute s’accélère. : c’est le héron qui bat des ailes. Faisant un suprême, mais vain effort, il tombe à terre, déchiré, blessé à mort par les deux faucons attachés à son dos, les serres enchevêtrées dans ses plumes qu’ils ont rougies de son propre sang.

Avec les faucons, on chasse encore la grosse bête et les oiseaux de proie de grande taille, même les aigles. Le dernier moyen auquel a recours l’oiseau chasseur et qui ne manque jamais son effet, c’est de se placer sur le front de sa proie et de lui crever les yeux à coups de bec. On ne voit que très rarement les grands seigneurs persans se servir du fusil, qu’ils laissent à ceux qui n’ont pas le moyen d’entretenir une fauconnerie. Il faut ajouter que l’art du fauconnier s’en va se perdant de plus en plus, car parmi les Persans, même parmi les membres de la famille royale, il s’en trouve peu d’assez riches pour en entretenir. On est bien loin aujourd’hui de l’époque des Sophis où, disent les traditions, il y avait jusqu’à huit cents oiseaux dans la fauconnerie du roi.

La passion des Persans pour la chasse n’exclut pas le goût de plaisirs plus délicats, On remarque chez eux un vif sentiment des arts, et