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les négocians et les banquiers, répondant à cet appel, se réunirent en effet à Paris le 20 juillet 1806. En présence de MM. Molé, Pasquier et Portails fils, maîtres des requêtes, commissaires du gouvernement, ils délibérèrent sur les questions qui, leur avaient été proposées au nom de l’empereur, et arrêtèrent les bases de l’organisation du culte israélite.

Les réponses de cette assemblée respiraient le dévouement à patrie, une vive et sincère adhésion aux idées nouvelles, et démontraient qu’il n’était plus permis, ainsi que l’avait fait, Portalis père en 1802, de considérer les israélites comme une nation à part au sein de la nation française. Cependant la plupart de ces réponses touchaient à la doctrine même et elles émanaient d’une assemblée où les rabbins, interprètes de la loi divine étaient en minorité ; l’empereur eut la pensée de leur, donner la consécration religieuse, et, remontant aux plus anciens souvenirs d’Israël, de réunir à Paris le grand-sanhédrin, qui serait presque exclusivement composé de rabbins. Toutes les synagogues ; de l’empire, qui s’étendait alors si loin, furent invitées à envoyer leurs délégués à cette grande assemblée. Ce corps, disait le rapport fait à l’empereur, ce corps,, tombé avec le temple, va reparaître pour éclairer par tout le monde le peuple qu’il gouvernait. Le grand-sanhédrin rassembla en effet et statua sur les objets déférés à son examen. On ne saurait dire qu’il les discuta, car, selon les habitudes de l’empire, toute discussion lui était interdite, et les documens qui ont été conservés sur la réunion du sanhédrin montrent avec quel soin jaloux et inquiet on s’efforça de prévenir la moindre délibération ; mais il n’est pas douteux que ses décisions étaient l’expression fidèle de ses opinions.

Ce que l’on demandait, tant à l’assemblée des notables qu’au grand-sanhédrin, se rapportait à l’état politique et civil des israélites en France, d’après leur loi religieuse. Regardaient-ils la France comme leur patrie et ses lois comme leurs lois ? leur était-il licite d’épouser plusieurs femmes, de divorcer sans le concours des tribunaux et pour des causes non admises par le code civil ? les mariages mixtes étaient-ils interdits ? l’usure leur était-elle défendue à l’égard de leurs frères ? n’était-elle pas permise à l’égard des étrangers ?

Les notables donnèrent les solutions qu’on devait attendre d’hommes éclairés et trop pénétrés des bienfaits de nos lois pour n’y pas être profondément attachés. Sur les questions relatives à leur nationalité, le procès-verbal de l’assemblée des notables constate que « l’assemblée manifesta, par un mouvement unanime, combien elle était sensible aux doutes que ces questions semblaient supposer,… que l’assemblée n’avait surtout pu contenir, le mouvement qu’avait excité en elle la sixième question, dans laquelle on demandait si les Juifs nés en France et traités par la loi comme citoyens français regardaient la France