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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.


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31 août 1852.

Dans cette vie sociale et politique où tout passe, où tout se renouvelle, où tout arrive, et où l’extraordinaire semble n’être qu’une des formes d’une certaine logique mystérieuse, il est trop d’usage parfois de ne voir dans les événemens qui s’accomplissent que les coups de foudre capricieux de la fortune. Ces événemens, si imprévus qu’ils soient en apparence, ont pourtant leur raison d’être. Nous nous étonnons souvent des choses auxquelles nous avons le plus aidé, et plus d’un songe à s’en repentir quand il n’est plus temps. Après tout, l’anarchie ne force point toute seule l’entrée d’un pays, quand on veille fidèlement et qu’on lui défend la porte, au lieu de la laisser ouverte et libre devant elle. Lorsqu’à la suite certains noms, certains souvenirs, certaines traditions qu’on croyait n’être plus que de l’histoire redeviennent de toutes puissantes réalités, il y a bien quelque autre motif qu’un inexplicable hasard. Voici une fête, — tout simplement la fête de l’empereur, — qui était, il y a quelques jours, célébrée en France pour la première fois depuis trente-neuf ans. De tous les anniversaires qui menaçaient singulièrement de se multiplier dans notre vie publique, celui-là seul est resté, et ce n’est point nous, à coup sûr, qui nous plaindrons de l’abolition de ce culte de toutes les révolutions passées. Toujours est-il que la fête de l’empereur, le 15 août, demeure le seul anniversaire national aujourd’hui. Le peuple a eu comme toujours ses spectacles et ses largesses. La garde nationale a eu, elle aussi, sa distribution des aigles. Le nom de Napoléon a brillé de nouveau dans les illuminations et les feux d’artifice, dans l’éclat des solennités officielles de notre pays. C’était plus qu’un souvenir ; c’était toute la politique actuelle elle-même. Où cette politique peut-elle mieux trouver son symbole que dans l’image qui plane sur la ville du haut de la colonne Vendôme, ou de ce piédestal improvisé qu’on lui a fait aux Champs-Elysées ? Comment s’est opéré ce changement dans les conditions politiques de la France, dans les symboles que nous