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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.


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29 février 1852.

Au milieu des transformations qui s’accomplissent dans la législation politique de la France, il en est une, — celle qui concerne la presse, — qui doit avoir pour nous naturellement un intérêt particulier. Ce n’est point un intérêt vulgaire. Par quel signe se caractérisent le plus essentiellement les régimes politiques modernes, si ce n’est par la place qu’ils font dans la société à la tribune et à la presse, ou, en d’autres termes, sous une double forme, à la puissance de la parole humaine et de la discussion ? Ce que la tribune est appelée à devenir aujourd’hui, la constitution l’a dit ; elle a tracé sa limite à la discussion législative, et la plus grande transformation qu’elle pût lui imposer à coup sûr, c’était de l’enfermer dans l’enceinte même où elle se produit, non à huis-clos il est vrai, mais sans retentissement au dehors. Ce que la presse doit être sous l’empire des institutions nouvelles, le décret du 17 février vient de le révéler. À vrai dire, il n’est guère possible d’innover beaucoup en matière semblable. Depuis les premiers règlemens de la révolution française jusqu’à la loi du 16 juillet 1850, n’avons-nous pas à notre usage la plus étrange variété de dispositions législatives, administratives, sans compter les autres moyens ? Le sens des événemens politiques détermine la nature des régimes sous lesquels la presse a successivement à vivre. Quels sont les points les plus essentiels de la législation nouvelle au milieu de l’ensemble de ses dispositions ? Le premier consiste à transférer aux tribunaux ordinaires le jugement de tous les délits de la presse ; le second, — de beaucoup le plus grave, celui qui caractérise véritablement la loi, — c’est le droit d’autorisation préalable que conserve le gouvernement à l’égard de toute publication périodique et la faculté de suppression administrative. Il n’est point difficile de lire dans : cette législation l’intention bien arrêtée de ramener la presse au sentiment rigoureux de sa responsabilité. Quant à nous, ce n’est point la sévérité des lois en elle-même qui nous pèse. L’illimité n’est ni dans notre foi ni dans notre goût. Il n’y a d’illimité que la sottise humaine, qui, aussitôt lâchée, imagine de