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ADMETE.


Charme invitant des bois, douce odeur, douce brise.
Va près d’elle, ô printemps ! souffle et me favorise.
Amenez-moi Myrto, sentiers qu’elle connaît,
Champs où, comme les fleurs, l’amour germe et renaît !
Par votre charme il faut qu’en mes bras elle vienne,
Brûlante d’une ardeur vive comme la mienne.
O vents, semez près d’elle, en allant y gémir.
Ces parfums qu’on ne peut respirer sans frémir ;
Qu’au plus secret du bois elle coure, éperdue,
M’implorant et craignant parfois d’être entendue,
Et qu’au premier abord, sentant ma main brûler,
Pâle, elle me sourie et ne puisse parler !

ERWYNN.

Désert, nature, asile où l’être se transforme.
Dans tes chastes séjours reçois mon cœur lassé,
Éloigne de mon ame, afin qu’elle s’endorme.
Et les bruits de la vie et l’écho du passé.
 
La plus sainte vertu que possède ton onde.
Ce que je vais chercher dans ton sein, c’est l’oubli.
Ce doux sommeil par qui s’éveille un autre monde,
Lorsqu’on ta longue paix on reste enseveli.

Parlez donc, ô désert ! ô voix de l’invisible !
Bois où tout autre amour a pour moi son tombeau !
Chantez de l’infini le cantique paisible,
nature, et bercez en moi l’homme nouveau !

L’AVEUGLE.

Sur un mode inconnu ta chanson se déploie,
pasteur, et pourtant je l’écoute avec joie ;
Avant d’être fermés au splendide univers,
Mes yeux ne l’ont pas vu tel que le font tes vers ;
Mais mon ame aperçoit des régions plus belles
Surgir à la clarté de ces hymnes nouvelles.
Je vois qu’un dieu, manquant au ciel ionien,
Enrichit d’un accord ton luth aérien.