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des prêts effectués. L’argent rentré dans les caisses au moyen de ces négociations devait être employé de nouveau en prêts hypothécaires qui auraient donné lieu à une seconde émission de lettres de gage. Au moyen d’un pareil roulement poursuivi indéfiniment, on espérait rendre de grands services à la propriété avec un faible capital, tout en procurant de beaux dividendes aux actionnaires. L’autre, projet, dû à M. Martin (du Loiret), consistait à fonder, sous le nom de Banques de crédit immobilier, des caisses pourvues d’un capital fourni aussi par des actionnaires moitié en argent, moitié en titres de rentes sur l’état ; elles auraient fait spécialement l’escompte des lettres de gage en émettant des billets au porteur remboursables à présentation, comme ceux de la Banque de France, opération très hasardeuse à notre avis. Nous n’avons qu’une médiocre confiance dans les combinaisons de ce genre. En supposant même qu’elles fonctionnassent suivant les prévisions de leurs auteurs, leur action, bornée par la faiblesse de leurs ressources, serait à peu près imperceptible dans cette immense carrière qui s’ouvre pour le crédit foncier. Au surplus, le décret du 28 février admettant, sauf autorisation, les sociétés de capitalistes spéculateurs, les systèmes de MM. Loyer et Martin ont chance, comme d’autres, d’être mis à l’épreuve.

Revenons à l’hypothèse d’une ou plusieurs sociétés d’emprunteurs se bornant à donner à leurs adhérens du papier mutuellement garanti. Dans les limites tracées par l’expérience, les sociétés de ce genre ne peuvent faire que des prêts sur première hypothèque et jusqu’à concurrence de la moitié de la valeur de la propriété. Quand l’immeuble est déjà hypothéqué, la société, après avoir négocié elle-même, si elle peut le faire avantageusement, ses propres lettres de gage, rembourse les premiers créanciers inscrits et se substitue à eux.

Le minimum des prêts, est-il dit dans le décret, sera fixé par les statuts de chaque société. Il est probable que ce minimum descendra rarement au-dessous de 500 fr., ce qui suppose une valeur de 1,500 fr. au moins à l’immeuble engagé. Il serait imprudent de prêter sur un fonds de moindre importance, parce qu’en cas d’expropriation forcée, les frais de justice, dévorant la valeur du gage, laisseraient l’administration à découvert. On pourrait d’ailleurs autoriser plusieurs possesseurs de petits immeubles à se réunir pour emprunter solidairement. Ce serait le moyen de faire participer la très petite propriété aux avantages du crédit foncier. Le projet de loi soumis actuellement au sénat belge permet ces réunions. Il y aurait opportunité plus grande encore pour la France que pour la Belgique. Chez nous, sur près de 400,000 emprunts dépassant la somme de 600 millions, il y en a environ 200,000 au-dessous de 400 francs ; cela donne une proportion de la moitié en nombre et de la treizième partie quant à la somme. En Belgique, les emprunts au-dessous de 444 francs forment seulement