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Il va sans dire que les établissemens créés depuis vingt ans ont profité de l’expérience si heureusement accomplie en Prusse. On s’accorde à reconnaître que l’association de Gallicie, fondée en 1841, a porté ses statuts au plus haut point de perfection.

Les institutions dont nous venons de parler s’étant multipliées, surtout en Allemagne, on pourrait croire que leur succès tient à des conditions particulières à cette contrée. Il n’en est rien. Le crédit foncier peut être naturalisé dans tous les pays où les immeubles sont susceptibles d’hypothèques, et facilement transmissibles à défaut de paiement. Si l’Angleterre n’en a pas essayé l’application, c’est que son territoire y est encore régi par la loi féodale, et que d’ailleurs le crédit n’y manque pas aux agriculteurs. Un pays qui est, pour ainsi dire, une copie réduite du nôtre, la Belgique, est à la veille d’installer une caisse nationale de crédit foncier, destinée, comme les banques allemandes, à servir d’intermédiaire entre les propriétaires qui cherchent des emprunts et les capitalistes disposés à prêter. Ici le mécanisme, dont la portée s’étendra au pays entier, fonctionnera par l’initiative et sous la responsabilité de l’état.

Il faut donc reconnaître que, si les banques immobilières n’ont cessé de se multiplier depuis quatre-vingts ans, lors même que leurs ressorts étaient fort imparfaits, c’est qu’elles répondent à des besoins de notre temps, c’est qu’elles rendent d’incontestables services. Il résulte d’un tableau publié par M. Josseau[1] que les associations les plus importantes, groupant autour d’elles une population de vingt-huit millions d’ames, ont procuré à la propriété foncière plus de 540 millions de francs, montant des lettres de gage qu’elles ont actuellement en circulation. Dans la plupart de ces pays, où l’intérêt courant (nous ne parlons pas des transactions usuraires) s’élevait, au dernier siècle, à 10 et 12 pour 100, l’argent est tombé, pour les propriétaires, à 3 et demi, somme qui, avec l’amortissement et les frais, ne porte qu’à 4 et demi ou 5 pour 100 le déboursé annuel. Beaucoup de terres encore écrasées de dîmes et de redevances féodales s’affranchissant, une révolution territoriale

  1. Nous résumons ici le tableau de M. Josseau :
    Ressort des banques. Population. Circulation des lettres de gage.
    Prusse (les sept associations principales). 10,162,000 388,536,000 fr.
    Hanovre (quatre associations). 1,759,000 34,000,000
    Mecklembourg 624,000 15,044,000
    Saxe (deux banques). 1,836,000 3,750,000
    Bavière, Wurtemberg et Bade 7,565,000 43,271,000
    Hesse-Cassel 755,000 37,988,000
    Nassau 425,000 6,420,000
    Gallicie 4,702,000 11,414,000
    27,828,000 540,423,000 fr,