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sinon la guerre. » Le cabinet de Ravenne, à bout de correspondances sans résultats, lui députait trois nobles romains pour s’entendre enfin avec lui, s’il était possible, et prévenir de plus grands malheurs. On avait choisi pour cette mission un homme qui semblait devoir être bien venu du Barbare, le comte Romulus, beau-père d’Oreste ; et on lui avait adjoint un officier-général, nommé Romarins, avec Promotus, commandant de la Pannonie. Un quatrième personnage, fort important dans la circonstance, Tatullus, père d’Oreste, avait voulu profiter de l’occasion pour visiter son fils. Priscus et Maximin furent heureux de retrouver des compatriotes au fond de ce désert sauvage, et les deux ambassades réunies attendirent dans un certain lieu le passage d’Attila, qu’on annonçait devoir être prochain. Au bout de quelques journées encore, le roi, l’armée et les deux ambassades romaines arrivaient en vue de la bourgade royale, capitale de toute la Hunnie[1].


II. – LA COUR D’ATTILA.

Le palais du prince barbare, placé sur une hauteur, dominait toute la bourgade, et attirait au loin les regards par ses hautes tours qui se dressaient vers le ciel. On désignait sous ce nom un vaste enclos circulaire renfermant plusieurs maisons, telles que celles du roi, de son épouse favorite Kerka, de quelques-uns de ses fils, et probablement aussi la demeure de ses gardes ; une clôture en bois l’entourait ; les édifices intérieurs étaient aussi en bois. Située probablement au centre et seule flanquée de tours, la maison d’Attila était encadrée dans de grands panneaux de planches d’un poli admirable, et si exactement joints ensemble qu’ils semblaient ne former qu’une seule pièce. Celle de la reine, d’une architecture plus légère et plus ornée, présentait sur toutes ses faces des dessins en relief et des sculptures qui ne manquaient point de grace. Sa toiture reposait sur des pilastres soigneusement équarris, entre lesquels régnait une suite de cintres en bois tourné, appuyés sur des colonnettes, et formant comme les arcades d’une galerie. La maison d’Onégèse se voyait à peu de distance du palais, close également d’une palissade et construite dans le même genre que celle du roi, avec plus de simplicité. Une curiosité y méritait l’attention des étrangers dans ce pays dénué de pierres à bâtir et même

  1. On a beaucoup discuté sur le lieu exact où cette résidence était située : les uns ont cru reconnaître Tokai, les autres, avec plus de probabilité, la ville actuelle de Bude ; mais tous s’accordent à décider que ce lieu se trouvait dans le pays qui est aujourd’hui la Hongrie. Le récit de Priscus ne laisse aucun doute sur ce point ; il nomme la Theiss parmi les rivières que l’ambassade traversa, et le compte qu’il fait des journées de marche s’accorde assez bien avec la distance des lieux.