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et elle pressait ouvertement Antoine de faire mettre à mort Hérode pour lui donner le royaume de Judée. Long-temps même après qu’Hérode eut construit Masada, il arriva que la prise de cette forteresse fut le dernier acte à accomplir pour les Romains dans leur guerre contre les Juifs.

Quand Sylva eut enfermé dans une muraille tout le terrain environnant la place, et lorsqu’il eut mis tous ses soins, toute sa vigilance à empêcher que personne ne pût s’échapper, il commença le siège au seul point sur lequel une attaque pouvait être dirigée. Après la tour qui fermait le chemin de l’occident vers le palais et le sommet le plus élevé, il y avait une éminence de rocher d’une grande étendue, mais inférieure à Masada d’environ trois cents coudées : on l’appelait Leukè. Aussitôt que Sylva l’eut gravie et occupée, il y fit accumuler de la terre par ses soldats. Grace à un travail opiniâtre, une jetée d’environ deux cents coudées de haut fut construite ; le terrain cependant n’en parut pas assez solide, ni l’élévation assez grande pour que les machines de guerre y pussent être établies. On construisit donc au-dessus de la jetée une plate-forme composée de rochers énormes, haute et longue de cinquante coudées. On y plaça des machines semblables à celles que Vespasien d’abord et Titus ensuite avaient employées pour prendre les villes ; on bâtit une tour de soixante coudées de haut, entièrement revêtue de fer, et du sommet de laquelle les Romains, avec force balistes et scorpions, écartaient les défenseurs de la muraille et ne leur permettaient même pas de montrer la tête. Ayant en même temps fait fabriquer un immense bélier, Sylva ordonna de battre le mur sans relâche, et il parvint à en renverser une partie. Pendant ce temps-là, les brigands occupaient et élevaient en toute hâte un retranchement intérieur qui ne pût, comme le mur d’enceinte, souffrir de l’action des machines. Afin que ce second mur fût mou et pût amortir les coups les plus violens, il fut construit de la manière suivante : des poutres étaient placées en long et bout à bout ; deux rangées parallèles de poutres disposées ainsi étaient distantes l’une de l’autre d’une quantité égale à l’épaisseur de la muraille ; l’intervalle des deux rangs de poutres était rempli de terre, et, pour contenir cette terre accumulée, d’autres poutres placées transversalement reliaient les poutres établies en long. Cette construction ressemblait donc en quelque sorte à celle d’un édifice ; de plus, les coups des machines appliqués à une paroi qui cédait étaient ainsi amortis, et les chocs, en tassant les matériaux, ne rendaient que plus solide l’ouvrage tout entier. Quand Sylva s’en fut aperçu, pensant qu’il viendrait plus facilement à bout de ce retranchement par l’incendie, il ordonna aux soldats d’y jeter force matières embrasées. Le mur, presque entièrement construit en bois, prit feu sur-le-champ, et, s’embrasant jusqu’au bout, il projeta une flamme immense. Dans les premiers momens de l’incendie, le vent qui soufflait du nord rendit la position des