Page:Revue des Deux Mondes - 1852 - tome 13.djvu/411

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

la rébellion. À la tête de son armée, il marcha contre Éléazar et les brigands qui occupaient Masada. Après s’être immédiatement emparé de tous les pays d’alentour, il plaça des garnisons dans les lieux les plus favorables, il entoura la forteresse d’une muraille afin d’empêcher les assiégés de s’échapper, et établit des postes de surveillance. Il choisit pour s’y loger l’emplacement le meilleur, à proximité de la forteresse, et au point où le rocher touchait à la montagne voisine. Là cependant il lui était fort difficile de se fournir les choses nécessaires, car ce n’étaient pas seulement les vivres qu’il fallait apporter de très loin et avec d’énormes difficultés pour les Juifs qui étaient chargés de l’approvisionnement du camp : il fallait y transporter jusqu’à l’eau, parce qu’aucune source n’existe en cet endroit. Après avoir pris ces premières dispositions, Sylva commença le siège avec beaucoup d’habileté et de fatigues à cause de la position de la forteresse qu’il s’agissait de soumettre.

Masada couronne un rocher très élevé dont le circuit est considérable. Ce rocher est entouré de tous les côtés par des vallées tellement profondes, que d’en haut on n’en peut voir le fond ; il est à pic et inaccessible, si ce n’est en deux points où il présente une rampe difficile. Il y a un chemin qui vient du lac Asphaltite vers l’orient, et un autre qui part de l’occident, et par lequel on arrive plus aisément. Le premier, au temps de Josèphe, se nommait la Couleuvre, à cause de son peu de largeur et de ses nombreuses sinuosités, qui lui donnent quelque ressemblance avec un serpent. Ce n’est qu’une anfractuosité dans le flanc des rochers qui dominent le précipice, revenant souvent sur elle-même et s’élevant de nouveau peu à peu, de manière à ne rejoindre qu’à peine un point plus avancé. Il faut qu’on chemine un pied derrière l’autre quand on gravit ce chemin ; un faux pas serait la mort, car les rochers à pic plongent de chaque côté de façon à remplir de terreur les plus audacieux. Quand on a monté ainsi l’espace de trente stades, ce qui reste à franchir est à pic ; mais le rocher ne se termine pas en pointe aiguë, et le sommet présente une esplanade. C’est là que le premier le grand-prêtre Jonathas bâtit une forteresse qu’il appela Masada. Plus tard, le roi Hérode y établit avec un grand soin de nombreuses constructions. Il fit enceindre le sommet d’une muraille ayant sept stades de développement, construite en pierres blanches, haute de douze coudées et épaisse de huit. Cette muraille était flanquée de trente-sept tours hautes de cinquante coudées. Ces tours communiquaient avec des bâtimens construits à l’intérieur et appliqués contre toute la muraille d’enceinte, car le sommet, qui offrait un sol productif et plus facilement labourable que tout autre, fut réservé par le roi à la culture, afin que si les vivres ne pouvaient plus être apportés de l’extérieur, ceux qui se seraient réfugiés dans la forteresse n’eussent pas à souffrir de la famine.