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À l’autre extrémité de l’Allemagne, Geisselbrecht, mécanicien de Vienne, exploita avec non moins d’habileté la vogue que le Faust de Goethe avait rendue aux marionnettes. Il représenta à Vienne, à Francfort, à Weimar, où résidait Goethe, un drame de Faust d’une rédaction un peu plus moderne que celle de Schütz et Dreher, intitulé : le Docteur Faust ou le grand Nécromancien, en cinq actes, mêlé de chants. Il avait à Francfort sa résidence principale. Un habitant de cette ville, le docteur Kloss, lui a vu représenter Faust en 1800, et, pour la dernière fois, en 1817[1].

On a conservé le souvenir d’une pièce de son répertoire, probablement féerique, et qui obtint un succès de vogue. Elle portait le titre bizarre de la Princesse à la hure de porc. Il s’efforçait de surpasser Dreher et Schütz par la perfection mécanique de ses petits acteurs, auxquels il faisait lever ou baisser les yeux ; il était même parvenu à les faire tousser et cracher très naturellement, exercice que Casperle, comme on pense bien, devait répéter le plus souvent possible[2]. M. von der Hagen, pour se moquer de cette puérile merveille, applique au mécanicien viennois les deux vers suivans du Camp de Wallenstein, que Schiller a imités des Femmes savantes de Molière

Cette étude vous a mal réussi. Vous avez peut-être appris comment le général tousse et comment il crache ; mais son génie…

Wie er raeuspert und wie er spuckt,
Das habt ihr ihm glücklich abgeguckt ;
Aber sein Schenie

[3]


IX. – FAUST SUR LES THEÂTRES DE MARIONNETTES. – TEXTES IMPRIMES.

Quelques critiques ont avancé que la légende de Faust est née sur les théâtres de marionnettes. Il est plus vraisemblable qu’elle a commencé, comme toutes les légendes, dans les veillées et dans les foires par des récits et par des chansons. On a dit encore que l’ancienne comédie de Faust (Historia Fausti, Tractätten von Faust, eine Comödie), attribuée à deux étudians de Tubingue et imprimée en 1587, avant l’histoire de Widmann, était une pièce de marionnettes[4]. Le fait seul de l’impression rend cette supposition tout-à-fait improbable.

  1. Carl Simrock, Doctor Johannes Faust, Puppen-Spiel ; Francf., 1846, notes, p. 107.
  2. Von der Hagen, Das Alte…, etc. Voyez Das Closter, t. V, p. 738.
  3. Schiller, Wallenstein Layer (Le Camp de Wallenstein), scène VI.
  4. Le sens qu’avait le mot comédie au moyen-âge, et qu’il a conservé long-temps, permet de douter que cette pièce fût autre chose qu’un récit.