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Deux portraits de femmes de M. Chaplin, méritent une attention spéciale. Celle qui est assise en robe gris perle est d’un ton général plein de suavité ; le second portrait est d’une gamme plus fougueuse, mais, quoique très beau, il n’a pas le charme pénétrant du premier. M. Chaplin ne peut manquer de réussir dans le portrait, il possède à un haut degré le naturel des poses, sa couleur est franche ; mais, ainsi que M. Landelle, il a besoin de serrer son dessin. Les portraits de M. Landelle ont de la grace, ceux de M. Larivière un fini un peu mou, ceux de M. Vastine et de Mme Juillerat beaucoup de fermeté dans la manière. Le Portrait de Mme F., par M. Édouard Dubufe se distingue par un air de tête des plus vrais et des plus gracieux. Les mains, habilement dessinées sont croisées par un mouvement d’abandon charmant. La couleur rose de la robe accompagne bien le velouté du visage et les accessoires de la toilette choisis par M. Dubufe avec un goût exquis, auquel on ne peut comparer que celui déployé par M. Giraud dans le Portrait de la princesse Mathilde. Les pastels de M. Giraud et ceux de M. Borione visent également à l’énergie. Ils y arrivent, mais par deux chemins opposés. M. Giraud a un faire plus large, plus cru : à distance ; il produit beaucoup d’effet ; mais cet effet n’est-il pas un peu semblable à celui de la peinture de décor ? Un pastel est généralement fait pour être vu de près ; il nous semble donc que M. Borione est mieux dans les conditions du genre. Ses portraits sont très travaillés, et il y obtient une sorte de clair-obscur, à la Rembrandt. Sans tomber dans la fadeur, qui est l’écueil du pastel, Mlle Nina Bianchi fait une habile combinaison des deux manières. Sa touche est très solide, sans être heurtée. À voir les trois portraits qu’elle a exposés, on ne se douterait pas qu’ils sont l’œuvre d’une femme. Il y a bien de la grace aussi et de la finesse dans une copie faite d’après une miniature de 1791, représentant Madame, fille de Louis XVI. Le pastel comme le traitent Mme Bianchi, MM. Giraud et Borione, acquiert dans le portrait le degré de vérité de la peinture à l’huile Mlle Louise Églé et M. Frédéric Gros-Claude occupent aussi un rang très honorable dans ce genre.


III

En ce siècle « vide de tout, » combien sont tentés de prendrez pour devise le mélancolique sonnet de Michel Ange :

<pome>Grato m’e’l sonno !…/poem>

Les ames fières et délicates qui ne voudraient plus rien voir ni entendre se replient avec une sorte de passion vers la nature, à laquelle on ne songeait pas autant lorsqu’on croyait à Dieu ou aux hommes ! Ainsi,