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du côté de Villaréal. Gomez fut aussitôt contre Jauregui avec ordre de le maintenir à Tolosa, et Eraso fut dirigé contre Espartero jusqu’à Villaréal, avec ordre de céder le passage si le général de la reine continuait à marcher sur Villafranca, puis de l’attaquer par derrière de façon à le mettre entre deux feux. Espartero campait sur les hauteurs de Descarga, qui dominent la : route royale. Ces positions sont inexpugnables ; Espartero parut vouloir s’y établir pour plusieurs jours, et, au lieu de continuer sa route vers Villafranca, il donna l’ordre à son arrière-garde de retourner à Bergara. Il tétait huit du soir ; la nuit était obscure, le temps épouvantable. Eraso, qui n’était qu’à une demi-heure de la position de Descarga, remarquant certains mouvemens dans le camp d’Espartero, fit avancer un escadron et quelques compagnies d’élite pour reconnaître la route. Ce détachement pénétra jusque dans les retranchemens ennemis à la faveur de l’obscurité. Voyant les armes en faisceau, dans les premières lignes, il fit irruption sur l’avant-garde désarmée. Une grande confusion se mît dans le camp, et Espartero se crut attaqué par toutes les forces des carlistes. Au lieu, de rallier les fuyards, il ne songea qu’à se défendre lui-même. Il se défendit bravement, il est vrai : il courut même plusieurs fois le risque d’être pris ou tué ; mais, pendant ce temps, son armée, ne trouvant personne pour la rallier, fuyait de toutes parts, saisie d’une terreur panique. Deux mille prisonniers, un bagage considérable, tout un matériel de guerre, telles furent les pertes d’Espartero dans la déroute de Descarga, qui n’avait pas coûté un seul homme aux carlistes.

Espartero rentra dans la nuit à Bergara ; dix-huit cents fuyards l’y rejoignaient le lendemain matin. Nous ne savons ce qui put le décider à se retirer si précipitamment vers Bilbao, au lieu de rester à Bergara, où il aurait pu rallier les débris de son armée et prendre même une éclatante revanche de la défaite de la veille, car les carlistes s’étaient éparpillés à la poursuite des.fuyards ; et rien n’eût été plus facile que de les surprendre. Il faut bien reconnaître qu’Espartero perdit la tête ce jour-là, et qu’il resta écrasé sous la honte de son désastre. À la nouvelle de la déroute de Descarga, la garnison de Villafranca, qui s’était si bravement défendue jusque là, mit bas les armes, et Jaunegui quitta précipitamment Tolosa pour se retirer à Saint Sébastien.Les garnisons d’Eybar, de Bergara et de Durango suivirent l’exemple de la garnison de Villafranca, toujours sous le coup du désastre de Descarga, et bientôt Zumalacarregui parut devant. Bilbao : c’étal le 10 juin 1835.

Ainsi il n’avait pas fallu à Zumalacarregui plus de trois mois pour anéantir, au moral du moins, une armée de plus de quarante mille hommes, pour acculer les christinos dans leurs places de guerre, Pampelune,