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comprises dans la présidence d’Agra. C’est pour cela que celle-ci paraît au premier abord avoir un budget si prospère. L’excédant du revenu de Madras ne s’est élevé au minimum qu’à 282,819 livres sterling ; le déficit de Bombay a dépassé 600,000 livres. Somme toute, le revenu brut de l’Inde entière était en 1847-48 de 24,615,984 ; mais, après les défalcations obligées, il ne restait net que 18,748,699, et, parmi ces défalcations, il faut placer en première ligne un chiffre effrayant de plus de 3 millions et demi pour frais de perception, c’est-à-dire au-dessus de 18 pour 100 sur la recette. Toutes les dépenses de l’Inde elle-même payées, il y avait encore en caisse plus de 1 million ; mais ce million ne suffisait pas pour les charges qui pèsent sur ce budget particulier dans la métropole, et il s’en faut encore de 1,631,077 livres que le revenu de l’Inde soit au pair des frais qu’elle nécessite. Voilà où en est l’Angleterre dans le plus magnifique de ses établissemens coloniaux après cent années d’efforts, après tant de combats livrés avec l’épée, la plume et la parole. C’est bien de quoi nous empêcher de perdre courage en Algérie, malgré les anathèmes de ceux qui sont sur ce chapitre des découragés de profession.

Le ministre du trésor aux États-Unis vient également de publier l’état annuel des finances américaines ; c’est une pièce du plus grand intérêt par les résultats comparés qu’elle présente. Tandis que le budget de 1850 se solde par un excédant qui dépasse 6 millions de dollars, l’excédant ne serait en 1851, selon les estimations officielles, que de 458,997 dollars. Selon le rapport du ministre américain, M. Corwin, ce fort accroissement des dépenses proviendrait encore de la liquidation des frais de toute sorte qu’ont entraînés la guerre et la paix avec le Mexique. L’expédition n’aura pas ainsi coûté moins de 217 millions de dollars. Le rapport exprime d’autre part les regrets les plus vifs au sujet de la diminution qui atteint les recettes de la douane, et qu’il attribue à des fraudes devenues habituelles dans l’évaluation des marchandises importées. M. Corwin se montre l’adversaire décidé du système des droits ad valorem qui a prévalu dans les tarifs de l’Union ; il croit que ce système est d’autant plus funeste, qu’il permet trop facilement de frustrer le trésor en multipliant les évaluations mensongères contre lesquelles la loi de juillet 1846 est impuissante. Il déclare avoir employé toute son autorité pour prévenir et pour découvrir ces mensonges ; mais l’abus est plus fort que l’autorité ministérielle : il y a tromperie sur la valeur déclarée de presque toutes les marchandises étrangères, et il est grandement temps que le congrès avise à quelques mesures efficaces. Au fond, l’on reconnaît dans le rapport de M. Corwin cette tendance protectionniste qui avait déjà percé dans le message du président. La presse anglaise ne s’était pas offusquée sans raison. Il devient de plus en plus probable que les tarifs américains subiront quelque remaniement. M. Corwin fait même au congrès en termes catégoriques une suite de propositions entre lesquelles il lui offre le choix, mais qui toutes aboutissent à modifier sensiblement le régime actuel des droits à l’importation.

La question est nettement posée : les droits aujourd’hui levés sur les marchandises étrangères sont-ils suffisans pour défrayer les dépenses annuelles et ordinaires de l’Union et pour suffire aux intérêts de la dette publique ? Le ministre du trésor ne le pense pas, et engage le congrès à prendre l’un ou l’autre des expédiens que voici. On bien le système de droits ad valorem serait changé pour