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distinguent leur race de la nôtre me frappèrent singulièrement. Les Indiens sont de petite taille, bien faits, mais peu musculeux. Leur peau est d’un rouge foncé ; leurs cheveux sont noirs, rudes et épais ; leur tête est petite ; leur front est peu développé ; leurs pommettes sont saillantes, leurs yeux noirs, petits et horizontalement fendus ; leur nez est aquilin, leur visage ovale et sans barbe. Les hommes portent un bonnet rond et plat en drap bleu, une chemise de coton, une veste, une culotte de gros drap et des sandales de cuir brut attachées au bas de la jambe par des courroies. Quand il fait froid, ils se couvrent de leur poncho, pièce de drap ou de coton taillée en carré long avec une ouverture dans le milieu pour passer la tête ; le poncho descend des deux côtés jusqu’à la ceinture. Tout ce qu’un Indien peut porter, il le plie dans son poncho, qu’il retire et jette sur son dos, les deux bouts noués sur la poitrine.

Les traits des femmes indiennes ressemblent à ceux des hommes ; seulement ils sont moins anguleux et respirent une grande douceur. Leurs cheveux sont partagés au milieu de la tête et tombent sur les épaules en deux longues tresses ; une pièce d’étoffe carrée, en général de laine noire, couvre leurs épaules et vient se rattacher sur la poitrine par une longue épingle de cuivre ou d’argent. Une veste à manches longues et étroites, ouverte sur le devant, croisée chez les unes et lacée chez d’autres, leur serre la taille ; une jupe en laine, recouvrant une demi-douzaine de jupons de laine ou de coton, descend jusqu’au-dessus de la cheville du pied ; des bas de laine et des sandales complètent le costume. Les étoffes qui servent à ces vêtemens sont filées et tissées dans la famille de chaque Indien. Leur contenance à tous, hommes et femmes, est humble et triste, et, quand un blanc les regarde, ils se découvrent respectueusement en saluant d’un Ave Maria purissima tatita. Je descendis pour suivre les Indiens et leurs troupeaux jusqu’à la place du marché, voisine de la maison que j’habitais. Les sacs de charbon furent déchargés, les llamas se couchèrent sur le pavé, et les Indiens, en attendant les chalands, commencèrent à préparer leur sobre repas, composé de maïs grillé et d’un plat de chupe. C’était un réjouissant spectacle que ce marché d’Aréquipa. Les melons, les raisins, les olives, les ananas, les oranges, les abricots, les pêches de vigne et tous les autres fruits d’Europe et d’Amérique étaient empilés sur des nattes étendues sous chaque étalage et protégées du soleil par des auvens en lambeaux de toutes couleurs. Les femmes attendaient, silencieuses et accroupies sur leurs talons, que l’on vînt acheter leurs marchandises. Comme le marché d’Aréquipa est le rendez-vous des habitans des campagnes et des hameaux environnans, des Indiens de la sierra et de la côte, les costumes sont variés et pittoresques. J’ai retrouvé là, à mon grand étonnement, le mouchoir