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compliqué des questions allemandes. Mentionnons cependant le message du président des États-Unis d’Amérique, en date du 4 décembre. Ce tableau développé de la situation américaine n’a point par lui-même une grande signification politique : le président recommande d’éviter autant que possible les conflits que la question de l’esclavage a failli susciter au milieu de l’Union ; mais il maintient nettement les mesures adoptées dans la dernière session du congrès, et même la loi relative aux esclaves fugitifs. Les chambres paraissent très décidées à ne plus revenir sur des débats terminés à si grand’peine. Un représentant ayant essayé de les renouveler dès les premières séances, sa voix a été étouffée par les murmures. La convention de la Georgie, qui avait d’abord donné de l’inquiétude, proteste de son attachement à l’Union. Un autre point essentiel du message, c’est que le président y propose d’augmenter le revenu fédéral en élevant les droits sur les importations. L’Angleterre a reçu avec un déplaisir assez marqué la nouvelle de ces intentions protectionnistes.

En Angleterre, l’agitation religieuse continue sans se refroidir encore ; les meetings succèdent aux meetings, et se partagent exclusivement avec les fêtes de Noël toute la pensée publique. En Hollande, on vient de voter le budget après une discussion assez animée, et la discussion même a rendu bon témoignage en faveur de la situation financière des Pays-Bas et de leurs colonies pour l’année 1851.

Plus le temps coule et plus les choses s’engagent en Allemagne, plus il est permis de douter que les conférences de Dresde aient chance d’aboutir à quelque résultat bien nouveau. La convention d’Olmütz a réglé l’essentiel ; le reste viendra quand il pourra. L’essentiel, c’était l’incident qui menaçait la paix européenne ; mais le reste, entendons-nous, ce n’est ni plus ni moins que ce qui de prime-abord paraîtrait le principal ; c’est la question toujours pendante de savoir comment l’Allemagne sera constituée, comment on l’organisera pour en former un seul corps et lui inculquer une même volonté. La question sûrement est grave ; par malheur les intéressés ont fait jusqu’ici plus de bruit que de besogne, et rien qu’à voir les dispositions avec lesquelles ils abordent maintenant à Dresde ce problème qui ne date pas d’hier, on a le droit de penser que la solution est encore dans les limbes. Elle n’en sortira peut-être pas de si tôt, et après tout il en faut prendre son parti, d’autant mieux qu’on n’aperçoit point beaucoup de péril en la demeure.

Ce n’était pas le cas à Olmütz vers les derniers jours de novembre. Il y avait là une crise qui pressait ; il y avait un choc matériel entre les deux puissances rivales. Les Austro-Bavarois arrivaient dans la Hesse jusqu’à portée de fusil des cantonnemens prussiens : la querelle en était à son expression la plus simple, à son dilemme le plus brutal ; elle s’embusquait pour ainsi dire au coin d’une grande route : les Prussiens laisseraient-ils, oui ou non, la route libre à l’Autriche ? Là-dessus, on aurait eu de la peine à multiplier indéfiniment les protocoles ; on s’est arrangé, et, par cet arrangement conclu en quelque sorte sur le terrain, il a été prouvé que la Prusse et l’Autriche, tout en ayant de bonnes raisons pour ne point s’accorder, en avaient encore de meilleures pour ne point se battre. S’il y a quelque chose d’acquis et de démontré dans la situation présente de l’Allemagne, c’est cela. Le hasard a nécessairement sa place au milieu des complications de la politique, et la prudence humaine