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sorte qu’ils arrivent au baptême déjà régénérés… Ainsi, selon lui, la grace spirituelle conférée par le baptême ne fait que confirmer la foi préalable. La régénération, la nouvelle nature, l’entrée dans la famille de Dieu, sont conférées, si elles le sont, avant le baptême. Il me paraît impossible de concilier une pareille opinion avec le simple et clair enseignement de l’église d’Angleterre quant à la nature du sacrement. Cela me paraît être une dénégation formelle de ce que l’église affirme, à savoir qu’un enfant devient dans et par (non pas avant ni après) le baptême un membre du Christ, un enfant de Dieu, un héritier du royaume du ciel… Si cette doctrine est vraie, alors le baptême n’est plus un sacrement selon la définition de l’église… L’église maintient que le baptême et l’eucharistie sont des affaires de dogme et non pas seulement de dévotion… Le baptême est un signe efficace de la grace, c’est-à-dire un signe qui produit l’effet qu’il représente, et par le baptême, Dieu opère invisiblement en nous… L’église déclare positivement que le baptême efface tous les péchés. Mais, dit-on, cette déclaration doit s’appliquer seulement à ceux qui le reçoivent dignement ; d’où la question de savoir si tous les enfans peuvent le recevoir dignement. Quel est l’obstacle qui, dans tous les cas, rendrait l’enfant indigne de la réception du sacrement ? Ce ne peut pas être le péché actuel. Le péché originel ou la condition héréditaire du péché est le seul obstacle qu’on puisse imaginer ; mais l’objet du baptême est précisément de remédier aux conséquences du péché originel. Loin donc d’être un obstacle à la réception du sacrement, c’est la raison même de son administration. »


Nous venons d’exposer les deux doctrines entre lesquelles le tribunal d’appel avait à juger. Le tribunal déclinait bien, il est vrai, toute intention de déterminer le point de doctrine ; il déclarait n’avoir pas à décider si telle ou telle opinion était théologiquement la vraie, mais seulement si elle était contraire à celle que l’église, par ses articles et ses formules, impose à ses ministres. Il était bien évident néanmoins qu’il se faisait juge en matière spirituelle.

Nous ne suivrons pas les juges dans la longue et minutieuse investigation qu’ils firent de toutes les opinions professées sur le baptême par les théologiens anglais. Ils démontrèrent parfaitement que, depuis la réformation, l’église avait été, selon leur expression, harassée par toutes les variétés d’interprétation sur ce point essentiel ; que les articles mêmes de l’église d’Angleterre avaient été, à différentes époques, différemment fixés, et que, dans de telles circonstances, le langage de l’église avait nécessairement une certaine latitude. Ils ajoutaient S’il est vrai, comme cela est indubitablement, que, dans l’église d’Angleterre, beaucoup de points de doctrine théologique n’ont pas été décidés, alors la première question qui se présente en des cas pareils est de savoir si le point en contestation a été fixé, ou s’il a été laissé à la libre et consciencieuse interprétation de chaque membre de l’église. »

La cour jugea donc en dernier lieu, et après avoir cité les opinions