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droits du peuple seront conservés dans leur intégrité, le tribunat, exerçant le droit qui lui est attribué par l’article 29 de la constitution, démet le vœu que Napoléon Bonaparte soit proclamé empereur des Français. »

Les Français, disait le sénat au premier consul[1], ont conquis la liberté ; ils veulent conserver leur conquête, ils veulent le repos après la victoire. Ce repos glorieux, ils le devront au gouvernement héréditaire d’un seul, qui, élevé au-dessus de tous, défende la liberté publique, maintienne l’égalité, et ’baisse ses faisceaux devant la volonté souveraine du peuple qui l’aura proclamé. C’est ce gouvernement que voulait se donner la nation française dans ces beaux jours de 89 dont le souvenir sera cher à jamais aux amis de la patrie, et où l’expérience des siècles et la raison des hommes d’état inspiraient les représentans que la nation avait choisis. C’est ce gouvernement, limité par la loi que le plus grand génie de la Grèce, l’orateur le plus célèbre de Rome et le plus grand homme d’état du XVIIIe siècle ont déclaré le meilleur de tous. L’histoire le montre comme l’obstacle invincible contre lequel viennent se briser et les efforts d’une anarchie sanglante et la violence d’une tyrannie audacieuse qui se croirait absoute par la force. Que l’oubli des précautions réclamées par la sagesse ne laisse succéder aucun orage aux tempêtes des gouvernemens électifs. Il faut que la liberté et l’égalité soient sacrées, que le pacte social ne puisse pas être violé, que la souveraineté du peuple ne soit jamais méconnue, et que la nation ne soit jamais forcée de ressaisir sa puissance et de venger sa majesté outragée. Le sénat développe dans un mémoire qu’il joint à ce message, citoyen premier consul, les dispositions qui lui paraissent les plus propres à donner à nos institutions la force nécessaire pour garantir à la nation ses droits les plus chers, en assurant l’indépendance des grandes autorités, le vote libre et éclairé de l’impôt, la sûreté des propriétés, la liberté individuelle, celle de la presse, celle des élections, la responsabilité des ministres et l’inviolabilité des lois constitutionnelles. »

« C’est le grand homme à qui nous sommes redevables de tant d’institutions libérales qui est appelé à gouverner l’empire, disait Portalis dans la discussion du sénatus-consulte du 18 mai 1804. Un sénat permanent continuera de veiller sur les destinées de la France. Ce sénat, sans partager le pouvoir législatif, aura la garde et le dépôt des lois ; il garantira la constitution des surprises qui pourraient être faites au législateur lui-même ; il remplira auprès de l’empereur l’office de sa conscience, en l’avertissant des erreurs qui peuvent se glisser dans les lois nouvelles et qui seraient capables de compromettre les droits que

  1. 4 mai 1804.