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REVUE DES DEUX MONDES.

au service de la Brinvilliers ou de Sainte-Croix, figurez-vous Mascarille et Jodelet jouant au scélérat comme ils jouent au marquis, et vous aurez une idée assez juste du Narcisse et du Pallas de MM. Jules Lacroix et Maquet. Claude est le seul personnage réussi, sans doute parce que Claude n’est pas un caractère, mais un personnage tout extérieur, en quelque sorte.

Mais pourquoi parler de caractères ou de passions ? MM. Lacroix et Maquet ne se sont proposé qu’un seul but, celui de fournir deux rôles à Mlle Rachel. Les personnages n’existent que pour donner la réplique à Valeria ou à Lycisca ; ils existent par cette seule raison qu’il est matériellement impossible qu’une action dramatique puisse se passer de personnages. Mlle Rachel est donc plus que l’interprète de ce drame, elle en est pour ainsi dire l’ame ; elle le remplit à elle seule. Nous sommes loin de nier le talent que Mlle Rachel a déployé dans ces dernières soirées ; jamais elle n’avait été plus fière dans ses rôles de reine plus naturelle et plus attrayante dans ses rôles de courtisane. Toutefois nous ne pouvons nous empêcher de l’avertir qu’elle doit renoncer d’exciter la curiosité par des moyens aussi étranges que ceux dont elle se sert depuis quelques années. On la fait se livrer ; si nous osons nous exprimer ainsi, à une suite d’exercices et de tours de force qui à la longue deviendront pour le public plus intéressans que son jeu si sobre et que le déploiement naturel de son remarquable talent. On avait composé déjà une pièce tout exprès pour lui faire lire la fable des Deux Pigeons, on lui’avait fait chanter la Marseillaise ; maintenant on lui fait chanter des couplets bachiques. Que les auteurs de Valeria renoncent à écrire des drames à cette seule fin de donner des rôles à Mlle Rachel, que Mlle Rachel renoncé à se montrer au public dans toute sorte d’attitudes excentriques cela sera plus digne à la fois des auteurs et de l’actrice.

ÉMILE MONTÉGUT.

ERRATUM.

Un passage de l’article sur les Guises, de M. A. de Saint-Priest, a paru, dans l’intérêt de la vérité historique, devoir être complété par quelques lignes. Le passage, tel que nous le rétablissons en soulignant les lignes ajoutées, précise mieux la pensée de l’auteur. Ainsi, livraison du 1er mars 1850, page 802, lignes 30 et suiv., après ces mots : « Quant au duc François, c’était le premier capitaine de son siècle, et sur ce point il n’y a ni doute, ni controverse, pas plus chez les contemporains que dans la postérité, » lisez « Guise fut héroïque devant Metz. il arrêta la fortune de l’aigle autrichienne. M. de Bouillé n’a point altéré l’éclat de ce tableau. C’est dans cette partie de son livre écrite avec autant d’exactitude que e verve qu’il faut voir Charles-Quint méditant son abdication devant les armes de la France. La suite ne répondit pas à ce début du duc de Guise. Chargé de défendre le pape contre les impériaux, il se laissa dominer par une préoccupation trop ordinaire à sa famille, et qui finit par contribuer à sa chute. »


V. de Mars.