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pour l’empire avec une exploitation mieux dirigée et une main-d’œuvre moins chère. Les mines de Congo-Socco et de Cata-Branca, concédées à des compagnies anglaises, ont offert jusqu’à ce jour des résultats satisfaisans. Il en eût été de même, sans doute, de la mine de diamans du Sincora, découverte en 1844 par un nègre qui gardait son troupeau, si l’on avait su y puiser avec modération ; mais les 4 à 500,000 karats qu’elle a fournis en peu d’années en ont tellement diminué la valeur qu’on a vu ces diamans se vendre moins cher en Europe qu’aux lieux mêmes de l’exploitation.

L’industrie brésilienne ne suffit guère encore qu’à la fabrication des objets de première nécessité. Le Brésil compte cependant des fonderies de cuivre et de fer, des verreries, des filatures, etc. ; mais la plupart de ces établissemens attendent, pour prospérer, qu’on y applique la vapeur. C’est à la fabrication du sucre qu’est limité au Brésil l’emploi de ce précieux agent. L’état de l’industrie brésilienne ne réclame pas seulement, on le voit, la protection du gouvernement, mais l’appui des capitaux, des lumières de l’Europe. Ici nous touchons à une question vitale pour tous les pays de l’Amérique, à la question de l’émigration, que nous traiterons en terminant, car elle touche à l’avenir même du Brésil.

Le Brésil a été le théâtre de nombreux essais de colonisation ; presque tous, malheureusement, ont échoué, hâtôns-nous de dire que ce n’est point par la faute du gouvernement. — La population libre du Brésil ne couvrirait pas la huitième patrie de la surface de l’empire ; quant à la population esclave, elle diminue à vue d’œil par suite des difficultés croissantes que présente la traite et des nombreux affranchissemens qui s’effectuent chaque jour. Presque tous les propriétaires donnent en effet la liberté aux enfans d’esclaves qui naissent chez eux, et cela, disons-le à leur louange, de leur propre mouvement et sans qu’aucune loi les y oblige. On le voit, le Brésil serait un excellent terrain pour l’émigration européenne. Sans doute, les nègres, accoutumés au climat de l’Afrique, supportent plus facilement que les Européens la chaleur tropicale, c’est incontestable : les Européens ont cependant sur eux d’immenses avantages ; s’ils ne travaillent pas aussi long-temps au soleil, s’ils s’épuisent plus vite, ils ont, en compensation, plus d’ardeur et d’intelligence. Tout cet empire, du reste, n’est point resserré entre les tropiques. La province de Sainte-Catherine jouit d’un climat analogue à celui de l’Italie, et plus loin, vers le sud, on retrouve le ciel des contrées tempérées du nord de l’Europe. Il y aurait certes là de grandes fortunes à faire pour des capitalistes européens auxquels on concéderait des lots de terrain suffisans, et qui amèneraient sur les lieux des hommes intelligens, en état de profiter des progrès modernes de la mécanique et de la vapeur.

La difficulté principale du gouvernement brésilien est de pouvoir contracter lui-même des engagemens avec des Européens travailleurs placés dans les conditions les plus avantageuses pour coloniser ces campagnes. Le Français guidé par des étrangers, ne montre pas assez de persévérance ; il faudrait qu’il eût pour chefs des compatriotes imprimant à sa colonisation les allures accoutumée des entreprises de la mère-patrie ; l’Irlandais conserve trop le souvenir de son malheureux pays ; les Suisses ont prouvé par la colonie de Mouro-Queimado qu’ils sont laborieux et opiniâtres, mais ils manquent de cette activité créatrice indispensable