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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.


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30 novembre 1851.

Nous ne consentons pas à désespérer du gouvernement parlementaire aussi entièrement qu’il semble en vérité désespérer de lui-même. Nous ne nous Joindrons pas contre lui à ceux de ses membres qui atrectent presque de se plaire dans le dénigrement de leur mandat, dans la déchéance de leur caractère, et qui font étalage de leur impuissance croissante, comme s’ils voulaient qu’on la prît pour une abdication méritoire. Nous ne nous joindrons pas aujourd’hui plus qu’hier à ces ennemis invétérés de toutes libertés publiques, à nos adversaires de tous les temps, que nous voyons triompher si fièrement du désastre apparent de nos institutions les plus chères. Nous ne nous joindrons pas, contre ces institutions trop attaquées, à ces ennemis de fraîche date qui tâchent d’avoir l’air de les détester encore plus vite que la foule, qui se piquent à qui mieux mieux de leur infliger un dernier coup, qui se disputent l’honneur de contribuer chacun pour la plus forte part à déprécier les idées et les droits au mépris desquels ils se sont si à propos convertis. C’est un spectacle qui nous dégoûte même plus qu’il ne nous navre que d’assister, comme nous y sommes obligés, à cet assaut livré de tous côtés au régime représentatif : ici la grosse artillerie des injures banales lâchée par les niais importans, là les déclamations sonores ou perfides des charlatans et des aventuriers ; enfin, derrière ces capitans de l’armée assiégeante, les petites bonnes gens qui se guindent sur leurs petites jambes pour obtenir l’honneur de décharger à leur tour leur petite escopette, et de faire feu avec la poudre que leurs chefs d’emploi n’ont pas brûlée.

Tout ce monde ne se déchaînerait certes pas avec cette ardeur, si l’on ne pensait livrer une bataille déjà gagnée, si on ne sentait, et nous demandons grace pour une expression encore faible à côté de la réalité, si l’on ne sentait derrière soi le souffle d’une multitude hébétée qui haleté après le repos, fût-ce le repos sous un maître. Oui, nous ne l’ignorons pas, le repos dans le silence et l’inertie, le repos même sans la dignité, c’est l’objet très sincère du vœu le