Page:Revue des Deux Mondes - 1851 - tome 12.djvu/747

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

reprise et la continuité du travail ont opéré cet heureux changement. Voulez-vous savoir au juste quel est le besoin et le vœu des populations? Mêlez-vous d’assez près à elles pour les entendre penser : le premier cri s’échappant des âmes a pour objet de demander du travail! Qu’il y ait parmi les ouvriers des individus rêvant l’oisiveté sous l’influence de doctrines absurdes qu’ils ne comprennent point, cela est vrai. L’esprit d’agitation,, là où il a réussi à pénétrer, ne pouvait pas avoir pour résultat d’augmenter l’amour du travail, ce fonds par lequel les nations prospèrent et grandissent. Cependant il n’y a qu’une infime minorité, en Normandie surtout, qui se soit ainsi laissé égarer. Quelques justes reproches qu’on puisse leur adresser sur certains points, les travailleurs de l’industrie ne ressemblent nullement à la populace dégénérée d’un autre temps et d’un autre pays, demandant à des puissances d’un jour, en échange de sa servitude, du pain sans travail et des jeux publics. Maintenir l’activité dans la production, telle doit être la constante pensée de tous ceux qui ont à cœur la conservation de l’ordre dans la société. Si les incertitudes de la politique fournissent un large thème aux préoccupations les plus graves^ c’est une raison de plus pour tâcher de détourner ou au moins d’adoucir la crise économique qui nous menace. Le travail est le grand instrument de la paix et de la sécurité publiques. C’est par l’amour du travail que les ouvriers normands ont été protégés jusqu’à ce jour contre les mauvaises influences qui les pressent. Qu’on ne néglige donc rien pour que ce sentiment trouve à se satisfaire; il est une des principales conditions de l’ordre dans l’individu, et par conséquent de la paix dans la société. Entre l’activité de l’industrie et le calme des populations, il y a une connexité que l’exemple de la Normandie ne permet pas de révoquer en doute, et qu’il appartient à la classe éclairée de mettre de plus en plus en lumière.


A. AUDIGANNE.