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croissante au moment où se retirait M. van der Heim faisaient des fonctions de ministre des finances en Hollande un fardeau qui semblait défier les esprits les plus inventifs et les plus résolus. Heureusement, et dans les momens de crise surtout, les hommes n’ont jamais manqué à la Hollande. En quittant son poste difficile, M. Rochussen avait recommandé au roi les capacités financières de M. van Hall. Membre d’une famille qui avait donné à la patrie de grands magistrats et d’éminens jurisconsultes, M. van Hall avait illustré le barreau d’Amsterdam, dont il était membre depuis 1812. Étant avocat de la haute banque, il avait approfondi les questions commerciales et financières de son pays. Au mois d’octobre 1843, il fut donc chargé, d’abord par intérim et bientôt définitivement, du ministère des finances, qu’avait abandonné M. van der Heim.

La situation du pays réclamait un remède héroïque : Afin d’échapper à une augmentation croissante des charges publiques, la nation se déclarait prête à s’imposer un sacrifice extraordinaire. Les orateurs de la deuxième chambre, entre autres l’énergique comte de Rechteren, enlevé trop tôt à la Hollande ; et l’éloquent Dam, van Ysselt, s’étaient tous prononcés dans ce sens. Entre le commerce et le crédit, disaient-ils, il existe un lien étroit : le commerce ne saurait exister sans le c r éd i t. Si le crédit était conservé, de meilleurs jours pourraient encore luire pour la patrie ; une fois le crédit perdu, tout disparaîtrait. Appuyé sur ce principe, M. van Hall prit l’initiative de deux grandes mesures financières. Il proposa d’abord un emprunt volontaire de 254 millions à 3 pour 100 d’intérêts seulement, et subsidiairement, en cas de non réussite de l’emprunt, un impôt extraordinaire qui devait le remplacer. Autour de ce projet principal venaient s’en grouper cinq autres, relatifs à l’emploi de ces voies extraordinaires : paiement des arriérés, qui s’élevaient à une centaine de millions ; rachat de la dette contractée envers la Société de commerce ; règlement des créances de l’ancien roi ; création d’une somme de 70 millions nécessaire au service des deux années suivantes. Le ministre fit appel à tous les citoyens, les invitant à ne pas reculer devant les grands sacrifices exigés pour le salut de la patrie. La discussion s’engagea avec une vivacité extraordinaire, dans le pays et aux états généraux, sur les mesures proposées par M. van Hall. Personne ne croyait à la réussite de l’emprunt : on l’attaquait à la fois comme chimérique et comme désastreux. M. van Hall résistait aux attaques de la presse et de la tribune avec un courage qu’on qualifia d’audace. Après plusieurs semaines de débats, la deuxième chambre adopta enfin les cinq projets à la majorité de 32 voix contre 25. L’emprunt volontaire une fois voté, tous les partis se réunirent aussitôt pour le faire réussir avec une émulation exemplaire. Afin d’échapper à l’impôt extraordinaire ses adversaires les plus