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Indépendamment de la fertilisation des bassins de l’Ille et de la Rance, de la conquête de terrains au moins égaux en valeur aux marais de Dol, qui seraient assurées par l’ouverture du canal de Vauban, serait-il d’un médiocre intérêt pour notre marine qu’une artère navigable partant du port de Saint-Malo en fît pénétrer le mouvement jusqu’à des lieux tels que Dol, Pontorson, Antrain, Ducey, Avranches, et dans ces campagnes fécondes qui, baignées par la mer, sont déshéritées par la vicieuse configuration de la côte des biens que devrait procurer ce voisinage ? On ne voit de navigation puissante qu’aux lieux d’achalandage et d’assortiment où de gros navires trouvent à prendre ou à déposer toute une cargaison ; le voisinage d’un grand port vaut mieux que la possession d’un petit, et nous ne regagnerons sur les mers le rang qu’y tenaient nos pères qu’en nous appliquant, dans les mieux situés de nos ports, à réunir en faisceau les forces isolées alentour, à les accroître en les combinant.

La Rance, dont les marées devraient amener les bateaux du canal à Saint-Malo aussi bien que les navires à Dinan, est la moins sillonnée de nos petites mers intérieures ; malgré la densité de la population des campagnes voisines, la plupart des abris ouverts sur ses rives sont encore déserts. Un seul est animé : c’est celui de la Richardais, dont les chantiers sont en possession de fournir à tous les ports de la côte de Bretagne, y compris celui de Nantes, des canots, des baleinières et d’autres légères embarcations. Un peu plus loin, dans l’anse qui s’enfonce vers Châteauneuf, languissent de misérables salines dont la surveillance coûte à la douane le double de ce qu’elles lui rapportent. Vient ensuite Saint-Suliac, qui possède une trentaine de petits bateaux de pêche et exploite, sous ses murs, l’étroit, mais excellent banc d’huîtres de Néril. En remontant encore, on franchit le grand barrage écluse du Châtelier, grâce auquel le port de Dinan, qui naguère asséchait dans les marées de quartier, n’a jamais aujourd’hui moins de 2 mètres 20 d’eau. À ce point, les vertes collines dont la Rance caresse le pied s’élèvent et se rapprochent ; bientôt on les voit réunies par un viaduc en construction qui projette, à 45 mètres de hauteur, sur l’azur du ciel et l’obscurité des bois, les naissances de dix voûtes hardies : les hauteurs de droite sont couronnées par les murailles gothiques, les vieilles tours crénelées et les promenades modernes de Dinan. Le viaduc doit donner passage à la route raccourcie et nivelée de Paris à

    40 centimes, ce qui porterait à 3 fr. 20 centimes l’équivalent du mètre cube de chaux. À ces deux sommes, il faut ajouter les frais de transport, qui, à poids égaux, seraient, en raison des distances à parcourir et des précautions à prendre, beaucoup plus considérables pour la chaux que pour la tangue. L’une ou l’autre de ces deux substances obtiendra donc la préférence suivant les lieux où devra s’en faire l’emploi, et souvent elles seront employées concurremment.