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mais chacune d’elles n’en a pas moins conservé la sienne propre, et si au nord on entend parler turc dans les bazars, djagataï sous les tentes noires, en descendant vers le sud on peut successivement reconnaître les idiomes kurde, zend et arabe.

Cette variété singulière dans le climat et la population de la Perse existe également dans les productions : à côté des fruits des latitudes élevées, on y récolte ceux des latitudes chaudes. Tandis que, dans le nord, on trouve le chêne, le peuplier, le saule, le pommier, le cerisier, en descendant vers le midi, on rencontre le mûrier, le cyprès, le dattier, l’oranger, le citronnier, ombrageant des plantations de coton et d’indigo. La Perse est, dans sa partie montagneuse, abondamment pourvue de métaux et de minéraux de toute sorte. Les Persans ont du fer, du cuivre, du plomb, de l’argent et de l’or; ils ont également de l’antimoine, du soufre, du salpêtre, du granit, du marbre, de l’albâtre, de l’ardoise, et ils possèdent des mines de turquoises assez riches. On trouve dans quelques endroits du bitume et du naphte. Malheureusement ils connaissent mal leurs richesses et ne savent guère les exploiter.

Le royaume d’Iran, que les Orientaux appellent aussi Adjem, est divisé en dix grandes provinces : l’Azerbaïdjân, le Ghilân. le Mazenderân, le Khourdistân, l’Yrakadjemi. le Khorassân, le Khouzistân ou Arabistân, le Fars ou Farsistân, le Kermân et le Loristân. Les chefs-lieux correspondant à ces provinces sont : Tabriz, Recht, Sari, Kermanchâh, Ispahan. Meched, Chouchter, Chiraz, Kermân et Lar.

Les populations nomades de la Perse vivent sous le patronage et l’autorité immédiate de chefs qui leur sont propres; elles mènent une existence toute pastorale. Quant à la population sédentaire, placée sous le gouvernement de ket-khodâhs, de hakims ou de begliers-beys, qui tiennent leur investiture du châh, elle se subdivise en trois grandes classes ou castes distinctes. En première ligne sont les khâns, qui constituent l’aristocratie ou la noblesse; au second rang se placent les mirzas, c’est-à-dire les individus de bonne famille, lettrés et exerçant une profession relevée; après eux viennent les raïas, qui comprennent tous les gens de travail, artisans ou agriculteurs. Les Persans n’appartiennent pas irrévocablement à la classe dans laquelle ils sont nés. Ils peuvent, par leur mérite ou par la faveur, en sortir pour s’élever et monter d’un degré, ou même de deux, l’échelle sociale. Un raïa intelligent qui a de l’instruction peut acquérir le titre de mirza, et, comme le châh crée des khâns par firmans, il arrive souvent qu’il accorde ce titre à un individu de la classe moyenne pour des services rendus ou même pour un prix convenu. Le titre de khân est militaire, en ce sens que tous les chefs de l’armée doivent en être revêtus; celui de mirza, au contraire, est purement civil. Autrefois il était un signe de noblesse;