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à défaire ce royaume avec la même ardeur qu’elle avait apportée à le fonder. Le cabinet de Londres unit sa politique à la politique française pour détruire l’œuvre de 1815. Les cours du Nord se montrèrent disposées à oublier les justes, les légitimes réclamations du roi de Hollande, afin d’avoir les mains plus libres dans leurs propres affaires. La conférence de Londres, après avoir imposé un armistice au roi, prononça, le 20 septembre, le démembrement du royaume des Pays-Bas et posa, les 20 et 27 janvier 1831, les préliminaires des dix-huit articles.

Les travaux de la conférence et la longue résistance du roi de Hollande aux protocoles de Londres sont des faits connus, sur lesquels nous n’avons point à insister. Le roi protesta contre les préliminaires de la séparation ; le congrès belge les accepta. Le prince d’Orange fit alors la glorieuse campagne du mois d’août et prit sur les bords de la Sambre une éclatante revanche sur le prince qui avait été deux fois son rival[1]. Après cette campagne, les fameux vingt-quatre articles vinrent remplacer les préliminaires de janvier : ils partagèrent entre la Belgique et la Hollande le Limbourg, le Luxembourg, qui, en 1815, avait été adjugé au roi Guillaume en échange de ses principautés héréditaires de Dietz, Dillenbourg, Siegen et Hadamar, et mirent à la charge de la Belgique un tiers de la dette commune. Le roi résista : il invoqua la foi des traités. Il espérait que la complication des affaires générales lui fournirait une occasion favorable pour ressaisir les provinces belges, où il avait conservé un nombreux parti. Les souffrances de Gand, de Bruges, de Verviers, d’Anvers, les émeutes dont ces villes furent le fréquent théâtre, la décadence rapide de leur industrie, de leur commerce, naguère si prospères, attestaient la puissance du parti orangiste en Belgique. Guillaume, en résistant aux protocoles de Londres, avait donc pour lui son bon droit, la situation incertaine de l’Europe, le grand nombre des intérêts avaient été atteints par la révolution ; mais il se trompa dans ses prévisions : la paix générale fut maintenue, grace à la sagesse du roi Louis-Philippe, et, comme si elle av ait choisi la malheureuse Hollande pour lui faire subir tous les fléaux de la révolution réprimée ailleurs, la conférence adopta contre elle des mesures coercitives et énergiques. Une armée française prit la citadelle d’Anvers, une flotte anglaise bloqua l’Escaut. La conférence assura à la Belgique les avantages du statu quo, l’intégrité territoriale du Luxembourg et du Limbourg, le non-paiement de huit millions et demi d’arrérages, la libre navigation de l’Escaut.

Ce dernier point fut capital pour la Hollande : c’était par l’article 3 surtout que le gouvernement néerlandais motivait sa longue résistance

  1. En 1821, le prince Léopold avait obtenu la main de la princesse d’Angleterre Charlotte, dont le prince d’Orange avait refusé les conditions, et il venait d’obtenir la couronne que celui-ci avait ambitionnée.