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dans son application, demeurerait inscrit en tête de la législation maritime de la Grande-Bretagne.


II.

L’historique de la législation hollandaise en matière de navigation sera beaucoup moins long, moins compliqué surtout, que celui de la législation britannique. C’est sous le régime libéral que la marine des Pays-Bas a grandi, et la liberté est assurément le plus simple des codes.

La prospérité maritime des Pays-Bas date du XVe siècle. Avant cette époque, les transports du commerce européen appartenaient, dans l’Océan et les mers du Nord, au pavillon des villes anséatiques, et, dans la Méditerranée, aux navires de Venise et de Gênes. Vers le commencement du XVIe siècle, les Hollandais pénétrèrent dans la Baltique, et recueillirent l’héritage commercial des Anséates, que les troubles intérieurs de l’Allemagne et une longue guerre avec le Danemark avaient presque ruinés. En 1560, la marine des Pays-Bas, qui s’était principalement développée par la pêche du hareng sur les côtes de l’Angleterre et de l’Ecosse, avait accaparé en grande partie le roulage maritime. On peut apprécier la rapidité de ses progrès en relisant le mémoire que Walter Raleigh adressait, en 1603, à Jacques Ier : « Les Hollandais nous envoient annuellement 5 à 600 navires, tandis que nous ne leur en expédions que 50 à peine... Ils ont 3,000 navires qui se rendent dans la Baltique, et 2,000 qui visitent les ports de France, d’Espagne, de portugal et d’Italie... Ils possèdent autant de bâtimens que les onze principaux états de la chrétienté, y compris l’Angleterre; ils construisent chaque année 1,000 navires... Ils entretiennent sur les côtes de la Grande-Bretagne 3,000 navires de pêche, montés par 50,000 matelots... Et cependant, ajoute l’auteur du mémoire, le transport des produits hollandais ne réclamerait pas plus de 100 navires. » Les Pays-Bas étaient donc, à cette époque, la plus puissante nation maritime de l’Europe. Ce peuple, qui occupait sur la carte une place si restreinte, disputée chaque jour à l’Océan, s’était créé en quelque sorte un nouveau territoire que peuplaient ses navires et que sillonnait son immense commerce.

Lorsque l’Espagne et le portugal envoyèrent à la découverte les escadres de Colomb, de Magellan, de Vasco de Gama, etc., les Hollandais ne les suivirent pas immédiatement dans les régions lointaines de l’Amérique et des Indes. Laissant à d’autres les périls de la conquête, ils préférèrent s’arrêter à Lisbonne et à Cadix, où ils prenaient, pour les répandre dans toute l’Europe, les produits apportés par les Espagnols et les portugais. Ce trafic de seconde main était devenu très considérable et très lucratif, lorsqu’en 1580 le roi Philippe II, alors