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cents vétérans, partis de Hou-nan et de Kouei-tcheou, vont renforcer ces troupes victorieuses ; mille autres soldats d’élite s’avancent du Kiang-nan. Le second décret annonce que deux cents soldats des huit bannières partent de Pe-king pour les frontières du Kwang-si. Le troisième déplore le mauvais succès des tentatives du dernier semestre et la triste conditions que les troubles ont faite aux classes inférieures. Le généralissime Sai-shan-gah, le capitaine-général des huit bannières, Pat-sing-tels, un général signalé par les services qu’il a rendus à Formose, Ta-hun-gah, sont envoyés sur les.frontières du Hou-nan et du Kwang-toung. L’empereur engage en même temps les généraux déjà placés à la tête des troupes, Li-sing-yuen, Chaoû-tien-tsioh et Giang-yung à redoubler d’ardeur, leur promettant des récompenses extraordinaires, s’ils peuvent donner à sa majesté la joie d’un triomphe avant que les nouveaux généraux aient rejoint l’armée. Le quatrième décret est un compte.-rendu des dépenses occasionnées par cette guerre civile. Li-sing-yuen a déjà reçu environ 6 millions de francs ; le ministère des finances doit lui en faire passer 7,500,000, et le trésor privé de la couronne lui expédiera une somme égale. C’est ainsi que l’empereur veut témoigner sa sollicitude pour la tranquillité de ses provinces méridionales. Le cinquième décret accorde à Chaou-tien-tsioh, l’inspection des opérations militaires dans le Kwang-si et le gouvernement de cette province à Lau-tsung-kwang. Les deux derniers édits sont consacrés à distribues des châtimens ou des honneurs à ceux qui ont mérité les uns ou les autres sur le champ de bataille. Un mémoire remis à l’empereur, et qui est ainsi publié plans la gazette de Pe-king, engage le fils du ciel à ne jamais perdre de vue le double danger, auquel est exposé l’empire : d’un côté les progrès des bandits du Kwang-si et du Kwang-toung, d’autre part le voisinage menaçant des barbares anglais qui épient sans cesse l’occasion d’un nouveau conflit.

Nous demandons grace pour ces extraits du Moniteur chinois qui ne laissent pas de répandre une certaine lumière sur la situation toujours curieuse de ces pays lointains. Nous ne voulons pas non plus oublier un incident qui nous intéresse d’une façon plus directe, et que nous nous empressons de relever au milieu des dernières nouvelles de l’extrême Orient. Les naufrages sont toujours fréquens dans la mer de Chine. Ainsi le Reynard navire anglais à hélice et à voiles, qui depuis deux ans rendait d’immenses services dans cette station, vient d’échouer sur l’écueil des Pratas. La perte d’un baleinier français, le Narval, qui s’est brisé sur les côtes de Corée, a fourni au consul que nous avons à Shang-haï, M. de Montigny, l’occasion de montrer encore un dévouement dont il a déjà donné, tant de preuves. Aussitôt instruit du naufrage, M. de Montigny s’est embarqué sur un navire de commerce avec l’interprète du consulat, et s’est porte vers les lieux qui avaient été le théâtre du sinistre. Ce ne fut qu’après avoir visité, à travers beaucoup de périls, les différentes îles qui bordent le littoral, qu’on découvrit enfin l’équipage dont on cherchait la trace. Le consul rejoignit ses compatriotes au moment où les Coréens allaient s’emparer de leurs personnes pour les diriger sur la capitale de la presqu’île. Le 1er mai, tous faisaient route pour Shang-haï.


ALEXANDRE THOMAS.