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a paru ; on ne peut que féliciter le savant éditeur de la manière dont il s’est acquitté de sa tâche. Du reste, les travailleurs dans l’Anjou n’ont guère été, dans ces dernières années, plus nombreux que dans la Touraine. Comme les traditions de famille y sont encore très puissantes, c’est surtout vers les recherches généalogiques que se tourne la curiosité, et c’est là l’initiation ordinaire aux études historiques.

Quoique l’érudition et l’archéologie aient fait, dans le Maine, depuis quelques années, des pertes très sensibles par la mort de MM. Cauvin et Richelet, cette province n’a cependant point ralenti ses travaux. Les bénédictins, en s’établissant à Solesmes, à quelques lieues de cette belle abbaye de Saint-Vincent-du-Mans, où fut écrite l’Histoire littéraire de la France, semblèrent chercher, dans ce voisinage même, des encouragemens et des exemples. Cette résurrection d’un ordre qui semblait à jamais éteint avec le dernier de ses représentans, le savant et vertueux dom Brial, exerça sur le mouvement des études locales une heureuse influence. Les religieux de Solesmes ont publié plusieurs ouvrages dignes sous plus d’un rapport de la vieille école bénédictine, tels que L’Essai sur l’abbaye de Solesmes, par dom Guéranger, et l’Histoire de l’Église du Mans. Le clergé séculier n’est point resté en arrière ; M. l’abbé Voisin, dans sa Vie de saint Julien, son Mémoire sur les divisions territoriales du Maine avant le Xe siècle, et son Histoire de saint Calais, a fait preuve de beaucoup d’érudition et d’une grande sûreté de critique historique, comme il fait preuve aussi d’une patience qui n’est plus de notre temps en se dévouant à la continuation de la Gallia christiana.

Le mérite sérieux de ces divers travaux place, pour l’histoire ecclésiastique, le departement de la Sarthe au premier rang de nos départemens érudits, et, dans un autre genre, l’Histoire littéraire du Maine, de M. Hauréau ; assure encore à ce même département une notable supériorité, ce livre étant incontestablement ce que l’on a publié depuis long-temps de plus complet et de plus exact en province comme travail étendu de critique et de biographie. Le Maine a produit, dans les spécialités les plus diverses, une très grande quantité d’hommes distingués, théologiens, jurisconsultes, érudits, philosophes, poètes, auteurs dramatiques, médecins ou naturalistes. Il est peu de provinces où l’aptitude des esprits soit aussi multiple, aussi variée, et c’est cette variété même qui formait le principal écueil du sujet traité par M. Hauréau, car il ne s’agissait de rien moins, sauf l’étendue du cadre, que d’une véritable biographie universelle embrassant toutes les connaissances humaines. M. Hauréau a courageusement affronté les difficultés d’un aussi vaste travail. Son Histoire littéraire du Maine contient, avec de nombreuses et importantes rectifications, un grand nombre d’indications nouvelles et de choses oubliées ou inconnues. L’histoire, la biographie, la critique, la bibliographie, y marchent toujours de front, et nous indiquerons entre autres, comme devant être consultées avec profit et lues avec intérêt, les notices sur Odon, abbé de Cluny, Hildebert, évêque du Mans, Jean de Courtecuisse, Raoul de la Porte, le père Mersenne, Robert Garnier, Bernard de la Ferté, Luc Percheron, Hortense Desjardins, plus connue sous le nom de Mm de Villedieu, Bernard Lamy, Duboullay, René Choppin, Guillaume et Jean du Bellay, Baïf, et une foule de poètes de l’école du XVIe siècle, qui formèrent à cette date comme les satellites