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où se trouvent leurs parens de suffire à des dépenses prolongées, ils réussissent rarement à utiliser plus tard l’instruction incomplète qu’ils ont reçue. Les familles qui ne peuvent envoyer leurs enfans au collège se contentent de l’instruction ordinaire. L’idée de l’enseignement spécial est à peine en germe sur ce sol, qui semble la repousser. Nulle part ailleurs le mot professionnel n’est appliqué dans un sens plus étroit ou plus faux.

Le centre de la France, si on laisse de côté le département de la Seine, qui domine au nord, et dont les établissemens méritent d’être mentionnés à part, n’est guère moins déshérité que la région occidentale. La plupart des départemens manquent là aussi d’établissemens sérieux. Des cours de dessin linéaire et de dessin plus ou moins applicable à l’industrie y existent seulement de loin en loin. On doit citer cependant quelques institutions qui accordent à la pratique une certaine part dans leur enseignement. Ainsi, le prytanée de Menars, institué, en 1832, dans le département de Loir-et-Cher, reconstitué récemment après avoir été fermé quelque temps, s’applique aux études industrielles. Conçu sur un plan analogue à celui de nos écoles d’arts et métiers, l’établissement est loin par malheur de disposer d’égales ressources. La ville de Tours a créé un cours de physique et de chimie, mais elle ne l’a point organisé sur des bases assez larges pour appeler beaucoup d’auditeurs. À Limoges, le conseil municipal et la société d’agriculture, en réunissant leurs efforts, ont obtenu de meilleurs résultats au moyen de leçons publiques et gratuites sur la géométrie, la mécanique, le dessin, le modelage, la stéréotomie. Dans la Haute-Loire, le Puy a été doté, en 1827, par des souscriptions particulières, d’une école industrielle gratuite, dont la ville acquitte les dépenses annuelles. Moins complète que celle de Strasbourg, cette institution est taillée sur le même modèle et reçoit une centaine d’enfans appartenant à des familles ouvrières. Le Puy possède encore quelques cours spéciaux ; mais le côté pratique de la science n’y est pas suffisamment mis en relief. Dans le département de la Corrèze, si pauvre et si maltraité par la nature, on voit avec plaisir à Tulle une école gratuite de géométrie mécanique ; le dessin linéaire y est appliqué au tracé des figures et des machines, à la coupe des pierres, à la charpente et à l’architecture.

À l’autre extrémité de la zone centrale, dans le département de la Seine, dont la richesse et l’éclat contrastent singulièrement avec le dénûment et la simplicité du pays que nous quittons, on a réuni la plupart des moyens d’instruction industrielle répandus çà et là sur la surface de la France. Paris n’a rien cependant qui soit comparable à l’école de tissage de Nîmes, aux institutions privées de la ville de Lyon pour le tissage des étoffes, aux écoles nationales d’arts et métiers de Châlons, d’Angers et d’Aix. On y chercherait vainement d’ailleurs un