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excellentes moralités, Man’s wit et the Dialogue of dives[1]. C’est à Shakspeare que nous devons l’indication de la troisième pièce. Dans le Conte d’hiver, le bandit Autolycus, qui s’est travesti pour commettre un mauvais coup, dit, en parlant de lui-même à quelqu’un qui l’interroge sans le connaître :

Oui, je connais ce vaurien : il a été conducteur d’ours et de singes, procureur et recors, puis il a promené une boutique de marionnettes, et il montrait l’Enfant prodigue[2].


IV. - MARIONNETTES DEPUIS 1562 JUSQU'A LA FIN DU REGNE DE CHARLES Ier.

Le cadre restreint du répertoire des puppet-shows s’agrandit naturellement lorsque le théâtre régulier s’établit en Angleterre. La grande révolution qui s’est opérée dans le goût européen et qu’on a nommée la renaissance a eu lieu pour le théâtre anglais vers 1562[3]. Alors, aux morals, aux masques, aux interludes, qui avaient été en faveur sous Henri VIII, Édouard VI et Marie, vint se joindre une foule de nouvelles sortes de drames, tragedy, comedy, history, pastoral, pastoral-tragical, comical-pastoral, en un mot toutes les formes de divertissemens scéniques que Polonius énumère si pédantesquement dans Hamlet. Alors aussi les puppet-players ne tardèrent pas à exploiter ces nouveaux genres. À l’exemple des enfans ou écoliers de Saint-Paul, de Westminster, de Windsor, de la chapelle de la reine et des servants des comtes de Leicester, d’Essex, de Warwick, de lord Clinton, etc., qui, sans cesser de jouer, à certains jours, des miracle-plays et des morals, offraient quotidiennement au public des pièces tirées de l’histoire ancienne ou nationale, les puppet players se composèrent un double répertoire, l’un religieux, l’autre profane. Parmi les pièces de la première classe dont le souvenir a survécu, je puis citer Babylone[4], Jonas et la baleine, Sodome et Gomorrhe, la Destruction de Jérusalem[5], et la plus célèbre de toutes les motions de cette époque, the City of Niniveh[6]. Cette dernière, si j’en crois un éloge un peu

  1. M. Payne-Collier, History of English dramatic poetry, t. II, p. 272.
  2. Winter’s Tale, acte IV, sc. II
  3. Cette année 1562, fut jouée devant la reine, à Whitehall, Gorboduc, première tragédie anglaise, composée dans la forme antique et avec des choeurs. Il n’est cependant pas certain qu’un drame sur le sujet de Romeo and Juliet n’ait pas précédé Gorboduc.
  4. Cette pièce est mentionnée par Anthony Brewer ; voyez Lingua or the combat of longue and the five senses for superiority, acte III, sc. VI. Dans cette moralité, représentée au collége de le Trinité à Cambridge, Olivier Cromwell, alors fort jeune, joua le rôle d’un des sens, celui du toucher.
  5. Ben Jonson, Every man out of his humour, acte II, sc. I, et the Bartholomew Fair, acte V, sc. I.
  6. Beaumont and Fletcher, Wit at several weapons, acte I. — Cowley, Cutter of Colemen street, acte V, sc. IX. — J. Marston, the Dutch Courtesan et Every woman out of his humour. — Pour ces deux dernières pièces, voyez Valone’s Shakspeare by Boswell, t. II, p. 449.