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laissent aucun éventualité dans l’ombre, les crédits à demander en cours d’exercice égaleraient à peu près, par la force même des choses, les crédits à annuler : l’équilibre s’établirait sans difficulté au moyen de ces compensations inévitables ; mais nous ne procédons pas avec cette simplicité, ni avec ce bon sens. Ce qui fait principalement l’excédant des dépenses, c’est que l’on se refuse à prévoir, en établissant le budget, tout ce qui doit être prévu. Le ministère, la commission du budget, la majorité de l’assemblée, tout le monde se rend complice de cette dissimulation volontaire. On se donne ainsi la satisfaction de peindre en beau, la moitié de l’année, une situation sur laquelle on vient ensuite, pendant l’autre moitié, et lorsque déjà les résultats parlent, passer une couche de deuil. Cette tactique puérile ne convient pas, dans la pratique du gouvernement, à une nation qui est parvenue à l’âge viril. On ne da tolérerait pas en Angleterre, et il y a trop long-temps qu’elle déshonore chez nous le système représentatif.

Le budget de 1851, suivant la loi du 29 juillet 1850, s’élève à 1,434,634,047 francs, qui se décomposent ainsi : dépenses ordinaires, 1,367,242,509 fr. dépenses extraordinaires, 67,391,538 fr. Les crédits supplémentaires votés ou à voter portent déjà l’ensemble des dépenses, le 1er avril, à 1,455,135,655 fr, et ce n’est pas le dernier mot de l’exercice[1].

En regard de ces charges, la loi des recettes (7 août 1850) évalue à 1,371,379,758 fr. le revenu de l’année 1851. Il en résulte une insuffisance apparente de 83,755,897 fr. M. Fould attend des progrès du revenu public un accroissement d’environ 22 millions, qui porterait les recettes de 1851 à 1,393 millions. En supposant que les crédits supplémentaires qui pourront encore être présentés soient couverts par les annulations de crédit qui interviennent en règlement d’exercice, l’insuffisance réelle serait, dans ce cas, réduite à 62 millions. Mais qui voudrait garantir que le produit des impôts indirects en 1851 égalera celui de 1850, et que la même cause qui diminuera les ressources n’augmentera pas les dépenses ? Je crois avoir serré de plus près la vérité en admettant pour l’année actuelle un découvert de 80 à 85 millions.

Le budget de 1852 est évalué, dans les propositions de M. le ministre des finances, à la somme totale de 1,447,091,096 fr, laquelle comprend les dépenses ordinaires pour 1,372,978,828 fr. et pour 74,112,268 fr. les dépenses des travaux extraordinaires. Il faut y ajouter, pour se placer dans le vrai et avant tout crédit supplémentaire, 13 à 14 millions pour l’effectif, de l’armée et 3 à 4 millions pour le service des paquebots de la Méditerranée ; les évaluations, ramenées à une plus grande exactitude, s’élèveraient ainsi à 1,464 millions.

  1. Au 1er avril, les crédits supplémentaires déjà votés pour l’exercice 1851 s’élevaient à 15,996,451 francs ; les crédits à voter à 4,505,157 francs : total, 20,501,608 francs.