Page:Revue des Deux Mondes - 1851 - tome 10.djvu/356

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

déposées par les particuliers en compte courant, il faut bien que la Banque cherche un autre client, et qu’elle transforme, en partie du moins, ses opérations. Les prêts ou avances à faire à l’état, pourvu qu’on les renferme dans des limites prudemment calculées, sont la conséquence directe de cette situation nouvelle. Sans ce débouché ouvert à ses capitaux, la Banque n’aurait plus de raison d’être, car elle ne rendrait plus que fort peu de services au commerce.

Le trésor peut emprunter aujourd’hui jusqu’à concurrence de 125 millions, savoir : 50 millions sur dépôts de bons de la république, et 75 millions en compte courant à 4 pour 100 d’intérêt, avec compensation à 4 pour 100 également pour les fonds que le trésor dépose. Cent millions ont été prêtés dans ces conditions, et le loyer que la Banque en a retiré figure, dans ses revenus, en 1850, pour un peu plus de 2 millions. L’état ne saurait obtenir un emprunt à des conditions moins onéreuses ; quant à la Banque elle-même, non-seulement ce prêt ne fait naître pour son crédit ni embarras ni dangers, mais elle se verrait bientôt réduite à l’état de l’avare qui couve stérilement ses écus, si le trésor ne lui offrait l’emploi de ses ressources disponibles. Sans cela, la France n’aurait entassé ses richesses dans les caves de ce sanhédrin que pour les rendre improductives. Autant vaudrait les jeter au fond de la mer.

Je pense donc qu’il convient, au lieu de rembourser les 100 millions empruntés par l’état, de renouveler sur cette base pour 1852, en épuisant au besoin le crédit entier de 125 millions, les traités conclus avec la Banque. Ce n’est pas là le côté faible de la dette flottante. Il faut chercher ailleurs le danger auquel on veut et l’on doit pourvoir. Ce danger, nous l’avons montré principalement dans l’accumulation des versemens opérés par les caisses d’épargne et dans l’exagération des avances faites par les receveurs-généraux[1]. La richesse de l’encaisse permet de rembourser dès à présent aux deux comptes. 50 à 60 millions, et de réduire d’autant la dette flottante.

La dette flottante, on le voit, porte aujourd’hui tout le poids des découverts antérieurs et des découverts postérieurs à l’exercice 1848. Nous les avons évalués, en les supposant liquidés au 31 décembre 1851, à près de 640 millions. En mesurant l’espace que nous avons parcouru depuis la révolution de février et en cherchant à se rendre compte de l’effet utile des efforts auxquels nous nous sommes livrés pour ramener l’ordre dans les finances, on peut constater que nous sommes parvenus à équilibrer, dans le budget ordinaire, les dépenses avec les recettes, à condition de suspendre l’action de l’amortissement pour un

  1. Au 1er avril, les avances des receveurs-généraux se trouvaient réduites d’environ 10 millions, et les versemens des caisses d’épargne augmentés d’une somme équivalents. Depuis le 1er janvier, le compte des caisses d’épargne s’était accru de 22,726,700 francs, ou de 7,575,566 francs par mois.