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À cette réduction, il en joignait d’autres sur le tarif des sucres et des cafés, sur les bois de construction et sur les graines de semences, qui représentent ensemble un sacrifice annuel sur le revenu de 1,550,000 liv. sterl. (38,750,000 fr.). En supposant un accroissement de consommation qui résulterait de la modération des droits, sir Ch. Wood espérait recouvrer près de 400,000 liv. sterl. Sur cette perte ; mais, au total, il agissait comme si l’excédant des recettes sur les dépenses était acquis à perpétuité, et il en abandonnait la plus grande partie pour apaiser les clameurs des faux réformistes.

On sait déjà qu’un sacrifice incomplet ne les a pas désarmés, et que, le ministère hésitant à leur immoler entièrement le budget, ils ont immolé le ministère. Les hommes les plus considérables du parti radical en sont venus à tenir un langage qui ne ressemble pas mal à celui de nos démagogues, et l’on a entendu M. Hume s’écrier : « Je tiens autant que qui que ce soit au maintien de la foi publique ; mais je ne voudrais pas consacrer l’excédant du revenu au rachat de la dette, tant qu’il sera possible d’en faire un meilleur emploi. N’aurait-il pas mieux valu, l’année dernière, abolir le droit sur les savons que d’acheter 1,200,000 liv. sterl. De consolidés ? » Le même raisonnement s’applique à tous les impôts. Si l’on abolit le droit sur les savons, pour donner plus de liberté à cette industrie, pourquoi ne ferait-on pas la même remise de taxes à l’agriculture, en supprimant le droit sur la drèche, qui produit plus de 100 millions de francs ? De suppression en réduction d’impôt, le trésor finirait par ne plus recevoir non-seulement de quoi éteindre la dette, mais même de quoi en servir l’intérêt. Que deviendrait alors cette fois publique, dont M. Hume ne croit pas déserter la cause en énervant, comme il conseille de le faire, les ressources de l’état ?

Le ministère de lord John Russell cédera, et le trésor succombera dans la lutte. L’Angleterre commence à éprouver les symptômes de cette épidémie de destruction qui désole le vieux monde. Sous prétexte d’économie, là comme chez nous, on pousse à la désorganisation administrative ; sous couleur d’alléger les charges du travail, on y proclame aussi la guerre à l’impôt. Ecoutons les plaintes que cet état des esprits arrache à l’Ecnomist, organe avancé, mais éclairé des principes de la science.

« La réunion publique qui vient d’avoir lieu à Southwark (faubourg de Londres), et dans laquelle on s’est occupé de notre système de taxes en général ainsi que de la taxe des fenêtres en particulier, nous donne une grande leçon que l’on ne doit pas oublier. Il paraît que le langage violent, irréfléchi, souvent même hypocrite et déloyal de cette secte de politiques qui s’en vont chaque année prêchant au gouvernement les réductions de dépenses comme son premier devoir, et excitant l’hostilité du peuple contre l’impôt, qu’ils lui représentent