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droite et à gauche, il, empiète ainsi sur les deux zones extrêmes depuis la mer jusqu’aux hauts plateaux du Sahara. Cette région montagneuse occupe tout le centre de l’Algérie : c’est le Tell, qui était autrefois un des greniers de l’empire romain, et qui est encore le seul grenier des tribus errantes de l’Afrique. Dans la zone du littoral se trouvent les plaines basses et humides, abritées de la mer par les hauteurs boisées du rivage (le Sahel), et des versus du désert par la croupe du Petit-Atlas. La zone des hauts plateaux ou Serssous, qui se perd dans le désert à travers les oasis, est la région des pâturages, comme le Tellt est la région des labours, comme le Sahel est la région des jardins et des fruits.

On, le voit, les montagnes dominent partout le système orographique de l’Algérie. Sur la ligne littoral, ce sont, les monts Traras, entre Nemours et Oran ; depuis l’embouchure du Cheliff jusqu’à l’embouchure du Mazafran, c’est l’immense crête rocheuse Au Dahra, qui surplombe la mer jusqu’aux environs même d’Alger ; plus loin et à partir de la pointe Pescade, toute la côte, jusqu’à la frontière de Tunis, n’est guère autre chose qu’une muraille non interrompue de rochers. Sur la ligne du Tell, depuis Mascara jusqu’à Tébessa, frontière de Tunis, s’étend un grand réseau de montagnes entremêlé de vallées. Enfin, sur la ligue du Sahara, le Grand-Atlas, sous des dénominations diverses, vient rejoindre la chaîne intermédiaire, à ses deux extrémités. Les montagnes de l’Algérie présentent, presque la même configuration que les montagnes de la Navarre. Ce sont les mêmes pitons taillés à pic, les mêmes sierras contournées et nouées en tout sens. Les vallées abondent, comme en Navarre : on croirait presque y retrouver les mêmes villages adossés à des pentes semblables. Seulement en Algérie, quoique les neiges et les froids subits soient fréquens la température est plus douce et la vigne y fleurit avec l’oranger. Les rochers sont couverts en général de chênes liéges, de pins ou de lentisques. Le laurier rose, qui fournit le meilleur charbon, pour la confection de la poudre, borde tous les torrens ; l’olivier sauvage grimpe à travers tous les précipices.

On nomme Kabyles les tribus qui peuplent les montagnes, pour les distinguer des tribus arabes de la plaine, desquelles les Kabyles diffèrent essentiellement. Leur origine est multiple, et dans leurs traits distinctifs on retrouve, encore la trace des diverses invasions qui ont passé, sur l’Afrique. C’est ainsi que, dans le massif du Djerjera, à côté d’une tribu évidemment originaire de l’Orient, on rencontre une autre tribu à visages blancs, à cheveux blonds et portant le signe de a croix latine tatoué sur les membres ou sur la poitrine. Ie temps et la nécessité des choses ont donné les mêmes habitudes, et, souvent aussi le même caractère à toutes ces tribus d’origine diverse. Tous les Kabyles sont fiers de leur indépendance, qui a résisté jusqu’ici à