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LA FRESQUE


DE S. ONOFRIO.




I

Vers la fin de juillet 1843, un vernisseur de voitures, nommé Masi, prit à loyer, dans la rue Faenza, à Florence, une vaste salle à rez-de-chaussée, dont la voûte en berceau et les épaisses murailles n’avaient guère moins de trois ou quatre siècles : c’était le réfectoire d’une ancienne communauté connue sous le nom de maison de S. Onofrio ou des Dames de Fuligno. Supprimé en 1800, ce couvent de nobles religieuses s’était, quelques années plus tard, transformé en filature de soie, et les chaudières à cocons avaient vomi sous ces voûtes de tels flots de fumée et de vapeur, qu’une couche épaisse de matières charbonneuses tapissait chaque pierre comme l’âtre d’une cheminée.

Le nouveau locataire, pour égayer ce noir séjour, le mit aux mains des badigeonneurs. Déjà la grande salle était à moitié blanchie, lorsque, à l’une de ses extrémités, on crut apercevoir sous la suie quelques traces de couleurs. Quoique vernisseur de son métier, M. Masi aimait la peinture. Il arrêta le badigeon, défendit de toucher à cette muraille, et se mit à en laver lui-même quelques parties. Le peu qu’il découvrit lui sembla fait de main de maître. Il courut en donner avis aux propriétaires de la maison ; mais ceux-ci n’en furent pas autrement émus. Il y a tant de fresques à Florence ! il y en a dans les rues, dans les greniers, dans les corridors ! où n’y en a-t-il pas ? Une de plus n’était pas merveille. Quelques voisins, quelques amis