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à la tête de cet établissement. Il l’appelait souvent pour s’entretenir avec lui des moyens de rendre à la célèbre manufacture son ancien éclat, d’y agrandir le domaine de l’art et de la science par la résurrection des verrières et des émaux. Déjà, en 1828, de premiers essais de verrières avaient été faits à Sèvres par ordre du roi Charles X ; mais, jusqu’en 1830, la somme des nouveaux produits n’avait pas dépassé 12,000 francs. Ce n’est en réalité que sous le règne et par les soins presque personnels du roi Louis-Philippe que l’art du XVIe siècle, l’art de Jean Cousin et de Bernard Palissy, reprit un grand et véritable essor. Cent soixante-cinq verrières, dont quelques-unes de la plus grande dimension, furent successivement ordonnées et terminées ; trente-huit décorent aujourd’hui un certain nombre d’églises que Louis-Philippe en a gratifiées. La fabrication des émaux n’a été introduite à Sèvres que plus récemment, en 1845. Encouragé par le roi, M. Brongniart dirigea tous les efforts de sa verte vieillesse vers cet art presque oublié, qui avait jeté un si vif éclat en France depuis les produits de Limoges au XIIe siècle jusqu’aux grands travaux de Pierre et Jean Courteis au XVIe siècle et aux chefs-d’œuvre de Petitot sous Louis XIV.

Le roi mettait d’autant plus d’ardeur à encourager la manufacture de Sèvres, qu’il favorisait par là même les progrès de toutes les industries qui se rattachent à l’art céramique. C’est encore dans cette pensée qu’une subvention royale permit à MM. Brongniart et Riocreux de publier leur ouvrage intitulé : Description du Musée céramique de Sèvres, et que des acquisitions nombreuses vinrent donner à ce musée une importance toute nouvelle. Au 1er août 1830, l’inventaire du Musée céramique se composait de 4,230 numéros, en y comprenant la collection de vases grecs donnée à la manufacture par Louis XVI ; du 1er août 1830 au 24 février 1848, le musée s’est enrichi d’un grand nombre de poteries, faïences et verres antiques de presque tous les pays du monde, qui ont nécessité l’addition de 4,500 autres numéros. Plusieurs de ces acquisitions ont eu une véritable influence sur les progrès des arts industriels en France : c’est ainsi que les verres de Bohême rapportés de Francfort par M. Brongniart en 1835 peuvent être considérés comme les premiers modèles dont se sont inspirées les cristalleries de Saint-Louis, de Baccarat, les verreries de Plaine de Walsh, pour arriver en quelques années aux magnifiques produits qui ont figuré dans les dernières expositions. Je craindrais de m’être étendu avec trop de complaisance sur les effets de la généreuse bienveillance du roi pour la manufacture de Sèvres, si cette bienveillance n’attestait pas une fois de plus sa sollicitude pour l’industrie française tout entière. À peine intronisé, le gouvernement provisoire a réduit d’un quart environ le crédit des manufactures nationales : la monarchie leur avait alloué en 1847 une