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de l’empire allemand en Suisse, M. Raveaux, adressa, le 4 octobre, une note au directoire, dans laquelle le gouvernement, de l’empire germanique accusait la Suisse d’avoir favorisé le mouvement des Badois, et réclamait une satisfaction complète dans le plus bref délai. Cette note, présentée par l’un des radicaux les plus prononcés de l’Allemagne, contrastait d’une manière frappante avec les tendances du ministre allemand comme avec les termes polis dans lesquels l’ancienne diplomatie avait toujours parlé à la Suisse. Contrairement aux usages établis, la note avait paru dans les feuilles allemandes avant d’avoir été présentée au directoire fédéral. Celui-ci (c’était toujours le gouvernement de Berne) y répondit le lendemain par une note non moins âpre, en disant que Struve et d’autres réfugiés avaient quitté la Suisse sans armes et isolément, et qu’ils avaient trouvé l’insurrection toute préparée dans le pays de Bade ; qu’en conséquence on ne pouvait pas qualifier d’invasion préparée sur le territoire helvétique l’appui prêté par quelques réfugiés aux insurgés de Bade ; que, du reste, avant toute demande, les autorités cantonales avaient décidé que les réfugiés qui avaient pris part à cette seconde insurrection ne jouiraient pas du droit d’asile, et que les autres seraient soumis à la surveillance spéciale de la police. Il y eut un second échange de notes d’un ton encore plus amer, mais sans résultat positif.

Le directoire de Berne avait lui-même reconnu précédemment que le seul moyen efficace d’éviter ces complications, c’était d’interner, mais d’interner réellement les réfugiés. Cela n’avait pas été fait, et en conséquence il n’aurait pas fallu affirmer que cela avait eu lieu. Le pouvoir allemand, de son côté, allait trop loin en voulant rejeter sur la Suisse toute la responsabilité de cette insurrection, qui avait été préparée aussi bien dans le pays même que par les réfugiés allemands en Suisse. L’exagération et l’âpreté des notes de M. Raveaux devaient nécessairement froisser la Suisse ; malheureusement, le directoire ne mit pas plus de dignité dans ses réponses. Sur ces entrefaites, un nouveau conseil fédéral prit les affaires en main, et y mit plus de bonne volonté que le gouvernement de Berne. Le 30 novembre, il adressa une circulaire aux cantons pour les inviter à ne permettre aucun armement, aucun rassemblement agressif des réfugiés allemands sur leur territoire. En même temps, le conseil fédéral chargea l’avoyer docteur Steiger de Lucerne (c’était encore un ancien chef de corps francs) d’une mission de représentant fédéral dans les cantons orientaux, pour veiller au maintien de la neutralité.

M. Steiger accepta cette mission et la remplit à l’entière satisfaction du conseil fédéral. Une conférence qui eut lieu à Bâle entre lui et un délégué du gouvernement de Bade finit par rétablir tout-à-fait de bons rapports officiels entre les deux pays. Les choses en restèrent là jusqu’au printemps de l’année 1849. Pendant que les armées autrichienne