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sarde, le conseil fédéral s’attendrait, avec la tranquillité que donne le sentiment intime du droit et de l’accomplissement consciencieux de ses devoirs, les décisions ultérieures du gouvernement du roi, se réservant de faire en tout temps ce qu’exigerait l’honneur de la nation suisse. » Le cabinet sarde fut obligé de se contenter de ces explications.

En 1849 comme en 1848, ce fut encore du côté de l’Allemagne que vinrent pour la Suisse les plus sérieux embarras. L’origine de ces difficultés remonte aux premières tentatives des populations allemandes pour se reconstituer en empire germanique. La Suisse avait d’abord applaudi à ces efforts ; elle n’avait pu voir avec déplaisir un changement qui aurait eu pour résultat nécessaire de la délivrer de la pression que la Prusse et en particulier l’Autriche avaient souvent exercée sur elle ; mais elle n’avait pas tardé à suivre avec quelque méfiance le mouvement qui tendait à ôter aux états du sud de l’Allemagne la presque totalité de leur souveraineté : ces états avaient avec la Suisse un intérêt commun, celui des petits contre les grands. Cette méfiance de la Suisse fut augmentée par le ton assez arrogant que prirent nombre d’Allemands placés en Suisse comme professeurs, et qui, pour ainsi dire, n’y avaient fait jusque-là autre chose qu’embrouiller les questions suisses par les idées et les principes du radicalisme hégélien. On remarqua d’ailleurs le ton superbe et résolu avec lequel plusieurs feuilles d’outre-Rhin, organes du teutonisme le plus absolu, revendiquaient la Suisse allemande pour le futur empire germanique. Des prétentions analogues, professées par plusieurs des membres les plus influens de l’assemblée de Francfort, n’étaient pas faites pour dissiper les ombrages des cantons. Une bonne partie de la presse suisse répondit à ces prétentions en termes peu mesurés ; or se moqua de cette assemblée de professeurs qui perdait des momens précieux en une discussion interminable de droits fondamentaux, tandis que les Suisses, avec leur bon sens pour seul guide, avaient réussi assez vite à donner à leur pays une nouvelle constitution. Pendant que la bonne intelligence s’altérait ainsi entre l’Allemagne et la Suisse, le gouvernement de Bade et la diète germanique adressèrent, au mois de juin 1848, au directoire suisse, des notes demandant une série de mesures contre les réfugiés allemands. Le 29 juillet, la diète suisse chargea le directoire de répondre par un refus à ces exigences, se fondant sur ce que les faits allégués contre les réfugiés n’avaient point été constatés par des enquêtes officielles. Peu de temps après éclata dans le grand-duché de Bade la seconde insurrection : ce nouveau mouvement se liait aux troubles déplorables qui survinrent à Francfort et dans beaucoup d’autres parties de l’Allemagne. Les populations suisses étaient de nouveau restées spectatrices calmes de ces mouvemens. À peine l’insurrection de Bade fut-elle réprimée, que l’ambassadeur