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ordonné par cette charte du droit commun ; dans ce cas, les palais de la couronne étaient conservés, mais non pas embellis et accrus ; les forêts entretenues, mais non pourvues de plantations nouvelles ; les manufactures royales maintenues dans les anciennes limites de leurs budgets ; les arts soutenus, mais non royalement encouragés ; la charité exercée dans le cercle restreint des fortunes privées. — Suivant l’autre conduite, Louis-Philippe pouvait jouir de la dotation en roi, conformément au droit exceptionnel et spécial consacré par la loi du 2 mars 1832. Dans ce cas, les palais de la couronne, trop long-temps négligés, reprenaient leur ancienne splendeur ; les forêts, percées de routes d’exploitation ou d’agrément, garnies de nombreuses constructions destinées à en mieux assurer la conservation, améliorées enfin par une foule de travaux de toute espèce, s’augmentaient encore par des semis et des plantations considérables ; les manufactures royales concouraient, par de larges travaux, à la restauration des monumens et des palais ; enfin la charité prenait vraiment des proportions royales. Par le premier des deux systèmes (et il pouvait assurément se croire en droit de l’adopter), le roi entrait dans la voie des grandes économies et s’assurait des ressources personnelles considérables. En s’attachant au second, il perpétuait une situation difficile et embarrassée ; mais il restait fidèle aux termes dans lesquels il avait lui-même défini sa mission dès les premiers jours de son avènement au trône. Louis-Philippe n’hésita pas, et il voulut poursuivre jusqu’à la fin l’œuvre qu’il avait déjà commencée.

L’attention du roi se porta d’abord sur les palais de la couronne, qui tous réclamaient plus ou moins une large et intelligente restauration ; mais l’entreprise était trop vaste pour qu’on pût de prime-abord l’embrasser tout entière. Les réparations et l’achèvement du Louvre et des Tuileries constituaient seuls une œuvre immense. Des travaux considérables étaient à exécuter sans délai dans les autres palais de la couronne, surtout dans ceux de Versailles, de Saint-Cloud et de Fontainebleau, depuis trop long-temps négligés. Il fallait choisir. Le roi opta pour les travaux que lui seul pouvait concevoir, entreprendre et terminer.

L’achèvement du Louvre n’intéressait pas seulement la couronne, mais aussi l’état, et Paris lui-même, siège de tous les grands pouvoirs, particulièrement fier de ce palais comme d’un monument plus parisien que tous les autres. En refusant de s’associer, dès 1833, à la pensée de M. Thiers, qui lui proposait de voter un crédit pour les travaux du Louvre, la chambre des députés céda seulement à des considérations de détail qui ne touchaient en rien au fond des choses. Le roi avait, si je puis m’exprimer ainsi, rempli son devoir envers le Louvre en demandant à l’état de l’aider à poursuivre cette œuvre nationale, trop forte et trop lourde pour les seules ressources de la liste civile. Un