Page:Revue des Deux Mondes - 1850 - tome 8.djvu/1096

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

de chaque signature, pour admettre les commerçans solvables et pour exclure ceux qui ne le sont pas ? Lorsque la Banque de France, par déférence pour le vœu du gouvernement et des populations, résolut de fonder un comptoir à Alger, elle stipula que les sept dixièmes du capital seraient fournis par des actionnaires nouveaux intéressés au commerce de cette colonie. Son apport, représentant en quelque sorte l’intérêt général ou métropolitain, ne devait pas excéder 3 millions de francs. Renversons la proposition, pour tenir compte de l’état de la société aux Antilles, et disons que si le fonds de l’indemnité coloniale contribue au capital de chaque banque de circulation pour une somme de 100,000 francs de rentes, une somme d’au moins 40,000 francs de rentes devrait former le contingent des associés volontaires. Ce serait une tache originelle et une cause de faiblesse pour le crédit de ces établissemens, si l’on pouvait alléguer qu’ils n’ont d’actionnaires que par ordre et qu’ils tiennent tout ce qu’ils sont de la loi.

Une banque ainsi constituée, opérant sur un capital d’environ 2,660,000 fr., avec la faculté de porter ses émissions à un chiffre de 5,320,000 fr., serait, dans les colonies, un instrument de crédit très efficace. Le projet pourvoit du reste à toutes les éventualités, en limitant la circulation du papier au double de la réserve en espèces. C’est encore une disposition très prudente et très rationnelle à la fois que celle qui donne un cours légal aux billets. La qualité de monnaie légale imprimée aux billets de banque ne fait pas violence, on le sait, aux transactions commerciales, car il est toujours loisible à celui qui a reçu une promesse de la banque de l’échanger, si cela lui convient, contre des espèces métalliques, la banque opérant ce remboursement à toute heure et à bureau ouvert. Le cours légal n’a rien de commun avec le cours forcé : celui-ci imprime au papier de banque une valeur arbitraire ; celui-là se borne à constater, sous une forme authentique, une valeur que la faculté d’échange maintient nécessairement à son niveau. Ce régime, qui est celui de la banque d’Angleterre, conviendrait certainement à la Banque de France, à laquelle on n’a pas cru devoir t’accorder, et qui ne le demande pas moins par raison que par un sentiment mal placé d’amour-propre ; il semble, à plus forte raison, être de rigueur dans les colonies. Comment naturaliser dans un pays neuf l’usage du papier de crédit, si le trésor colonial, qui est le principal intermédiaire de la circulation, ne donne pas, en l’acceptant au pair de l’argent, l’impulsion et l’exemple ?

La division des coupures est une difficulté plus sérieuse et qui partage plus radicalement les esprits. La banque d’Angleterre, on le sait, n’en émet pas au-dessous de 5 livres sterling. Il a fallu une révolution et à la suite le monopole des émissions pour décider la Banque de